Un tournevis, une voisine, un hérisson [Caleb - Terminé]

Cela faisait à peine un mois que la jeune femme était dans la grosse pomme. C’était parti pour une nouvelle vie. Qui ne rêvait pas à cet âge-là de refaire le monde ? De voyager et de voir différents paysages, différentes cultures ? Pourtant à la base, Evelyn était très famille, très attachée au Kentucky également, mais depuis le décès de sa sœur Irène, quelque chose s’était comme cassée en elle que depuis lors, elle avait besoin de s’envoler et surtout de vivre, et ça, elle l’avait fini par comprendre grâce à son oncle Jack et encore plus lorsque ce dernier tomba malade. Certes, c’était compréhensible qu’elle soit blessée par ces pertes mais il fallait bien qu’elle continue à vivre, que ce soit avant tout pour elle mais aussi pour eux. C’était si triste de démarrer sa vie et comme cela. Evelyn était encore si jeune ! Pour le coup, de vivre ici et de travailler dans un musée pareil, on ne pouvait pas rêver mieux qu’Evelyn commençait bien à s’y plaire, même si elle n’avait pas encore tout à fait déballer tous ces cartons.

En ce mercredi, Evelyn était en congé donc elle pouvait prendre du temps pour elle. Et cela se résumait soit à sortir et à se promener dans la pomme, ou soit profiter de son chez elle pour faire un peu plus de rangement ! Parce que bon, elle avait eu le temps d’installer le minimum et le plus primordial : son lit et ses ustensiles de cuisines. Son canapé, elle avait pu se le faire livrer la semaine précédente et quant à sa table de cuisine ? C’était seulement son comptoir qui jouait ce rôle puisqu’elle avait une cuisine très américanisée. Alors là, elle pouvait profiter pour monter des étagères afin de ranger sa bibliothèque mais en ayant les planches et les vis devant elle, elle remarquait bien qui lui manquait quelque chose, et elle aura beau faire tous ces cartons, elle ne trouvait absolument pas de tournevis. En fait, si, un tournevis mais il ne correspondait absolument pas au vis. Super !

Que devrait-elle faire là ? Allez courir à travers toute la ville pour aller acheter un pauvre tournevis ? Surtout qu’elle ne connaissait pas trop la ville et elle se voyait mal acheter une pauvre chose pareille… bien que ça pouvait lui servir si elle souhaitait redéménager par la suite, cependant. Mais en fait, elle avait surtout bien la flemme ! Elle pouvait le demander à sa voisine mais elle lui avait donné une mauvaise impression : elle ressemblait à une vieille peau ! Bon, là, c’était méchant mais lorsqu’elle l’avait croisé, elle lui avait foutu froid dans le dos. Evelyn était persuadée que cette vieille mémé la prenait pour une terroriste. Bref, sur ce fait, Evelyn pouvait demander à un voisin de l’étage d’au-dessus peut-être ? Au moins, pourrait-elle vérifier que tous les habitants de l’immeuble n’étaient pas tous comme cette vieille mégère ! Et cela pouvait aussi lui permettre de connaître quelques personnes dans cette ville.

Sur ce, à cette personne, Evelyn ne se fit pas prier. Elle prit ses clés et sortit de son appartement pour monter les escaliers et se retrouver à l’étage supérieur. La jeune femme ne fit pas véritablement attention mais elle prit la première porte qui lui venait sur sa gauche, en espérant également qu’il y aurait quelqu’un au passage. Tout le monde n’avait pas forcément la chance d’être en congé en milieu de semaine contrairement à elle, travaillant dans le tourisme, elle n’avait pas de weekends et de vacances comme tout le monde.

En ce mercredi, Caleb se trouvait à la maison au lieu du terrain de Base-Ball à donner des cours. Comme tout à chacun, il était tombé malade. Pas grand-chose, juste un rhume. Il n’arrivait pas à savoir si c’était Tess qui lui avait refilé parce qu’elle avait été malade la semaine précédente, ou si c’était l’un de ses gamins à l’école. Et oui, les microbes crapahutaient surtout en cette période de l’année. Bien sûr, il aurait pu demander de l’aide à ses parents mais il ne voulait pas abuser de leur générosité. D’autant plus, qu’il lui fallait aussi penser qu’ils ne seraient pas forcément présents quand il aurait besoin de leur confier leur petite fille. Il devait aussi apprendre à la laisser entre les mains d’autres personnes, comme à Naëlle la baby-sitter ou encore à Drew, voir à Chris s’il était de congés et que Fred était avec lui.

Autant dire qu’il s’était trainé depuis qu’il était debout. Et oui, Tess l’avait levé à 7h pour avoir son petit déjeuner. Et la petite avait dû venir le secouer à deux reprises parce qu’il avait vraiment du mal. Puis une fois levée, il n’avait pas pu aller se recoucher parce qu’il devait s’occuper de sa fille. Le temps qu’il finisse de déjeuner, il lui avait mis les dessins animés. Durant ce laps de temps, il avait téléphoné à Drew pour savoir s’il pouvait assurer le rôle de coach de Base-ball tout en lui expliquant la situation. Son ami et collègue avait accepté avant de lui dire qu’il ferait un tour dans la soirée pour avoir des nouvelles, avec un bouillon de poule.

Pour pouvoir tenir toute une journée, Caleb se shoota aux médocs. Pas des trucs trop forts, de l’aspirine pour son crâne et un peu de sirop pour la toux.

Heureusement pour lui qu’il avait dans le freezer des petits plats préparés par sa mère. Oui, cette dernière en faisait toujours trop pour les repas du dimanche midi. Donc il repartait souvent avec des boites Tupperware avec les restes, pour quand il n’aurait pas le temps à se faire à diner. Généralement, il les sortait les soirs où Tess n’était pas chez lui pour ne pas lui donner de mauvaises habitudes. Il préférait cuisiner parce que ça lui permettait de décompresser, parfois sa fille lui donnait un coup de main. Mais là, même s’il avait tous ce qu’il fallait pour préparer un bon repas, il n’avait pas le courage de réfléchir et à éplucher des légumes. Non, il y avait de la ratatouille et un reste de riz, il ne lui resterait plus qu’à chauffer des steaks hachés.

- Tess va te laver les mains avant de passer à table, s’il te plait !

- Oui, papa !

Il avait de la chance d’avoir une fille comme la sienne parce qu’elle faisait plus ou moins ce qu’il lui demandait sans rechigner. Enfin ça ne durerait pas longtemps, il en était bien conscient. Pendant ce temps-là, il mit la table puis les aliments dans les assiettes. Quand ils eurent fini leur repas, Tess débarrassa la table avant d’aller faire des dessins sur la table base, devant la chaine des clips vidéos. Les dessins animés s’étaient bien durant un temps, il fallait diversifier un peu. Néanmoins, le jeune homme n’avait pas peur, il avait programmé le contrôle parental donc elle ne tomberait pas sur une chaine inappropriée. Pour regarder certains autres programmes il fallait un code, que seul Caleb connaissait ainsi que quelques autres personnes.

Il avait lancé la cafetière, il aurait besoin de café. Tant pis, s’il ne dormait pas de la nuit du moment qu’il était en forme pour assurer ses heures de boulots le lendemain.

- Papa, tu peux me donner mes peintures ?

- Bien sûr, Chaton !

*Ou est-ce que j’ai foutu sa peinture à l’eau ? s’interrogea-t-il tout en se grattant sa barbe, enfin les trucs qui recouvrait son menton et qu’il n’avait pas rasé ce matin.

Il était train de fouiller dans les tiroirs de la cuisine quand on frappa à la porte de son domicile. Il jeta un coup d’œil pour avoir un aperçu de l’heure et voir de qui il pourrait bien s’agir. Il mit la main sur la palette de peinture et se dirigea vers la porte.

- Désolé, Maman j’ai oublié de te prévenir… Les joues de Caleb, du moins la partie qui n’était pas mangé par la barbe prirent quasiment la même teinte que son nez, appendice rougi à force de se moucher. Oh pardon, j’ai cru que c’était ma mère… Enfin bref, bonjour et que puis-je faire pour vous ?

Il jeta un coup d’œil par-dessus l’épaule de la jeune femme pour s’assurer qu’il ne s’agissait pas d’une démarcheuse pour aspirateur.

Après avoir sonné, Evelyn attendit patiemment sur le palier de la porte, en espérant à ce qu’on vienne lui ouvrir. Au pire, elle irait chez le voisin d’en face ou comme elle ne se voyait pas faire tout l’immeuble, elle abandonnera pour attendre le soir où là, elle aurait plus de chance de trouver quelqu’un pour que celui-ci lui prête le tournevis, si tournevis il avait. Enfin bref, par chance, on lui ouvrit et Evelyn se retrouva alors face à un homme, qui s’attendait sans doute à se retrouver face à sa mère, ce qui pouvait la faire sourire, sur le coup !

Ce n’est pas grave ! Je…

Avec cette réponse amusante inattendue, il fallait qu’Evelyn reprenne ses esprits afin de lui dire la nature de sa venue.

Euh bonjour ! Excusez-moi de vous déranger ! Je suis Evelyn. Je viens tout juste d’emménager à l’étage d’en dessous et je me suis rendue compte que je n’ai pas le tournevis qu’il me faut pour monter un meuble. Peut-être que vous pouvez me dépanner, s’il vous plait ?

Savait-on jamais ! Sur ce, elle lui lâcha un sourire. Et puis au moins, elle aurait vu à quoi ressemblait le voisin d’au-dessus et serait sans doute plus sympa que cette vieille mégère de voisine. Ca serait bête de partir sur l’idée que tout l’immeuble était empoisonné de ce genre de personnes ! Non, Evelyn ne partait pas dans son délire, même s’il fallait dire que depuis son arrivée à New York, elle ne connaissait pas grand monde pour le moment, à part les quelques collègues de boulot mais c’était tout !

Evelyn passa une main dans ses cheveux ondulés, attendant une quelconque réponse, espérant qu’il puisse l’aider, ne prenant même pas peur vu sa tenue un peu décontractée. Au moins, s’il lui trouvait son tournevis, ça serait une bonne chose de faite lorsqu’elle montera ses étagères et ensuite ranger ses bouquins, et tout son bordel. Ca l’avancerait énormément, sinon en se connaissant, elle savait carrément que ça ne sera pas fait avant trois mois ou jusqu'à ce que tout se monte tout seul.

Autant dire, qu’il avait réellement l’air d’un con. Il aurait mieux fait de regarder par l’œil de judas pour voir qui avait sonné. Tout comme il le conseillerait à sa fille quand elle aurait la taille adéquate avant d’ouvrir la porte. Caleb fit de son mieux pour réparer son erreur et heureusement que la nouvelle venue ne lui en tint pas rigueur.

Il écouta celle-ci prendre la parole puis s’interrompre quelques instants avant de reprendre depuis le début. Pour le coup, il regrettait presque qu’il ne s’agisse pas de la mère d’un de ses élèves mais en même temps, il était effrayé à l’idée que l’une d’elle puisse se pointait chez lui pour lui faire du rentre dedans. Heureusement qu’il avait eu l’idée de donner l’adresse de ses parents lorsqu’il avait rempli les documents suite à son embauche. Du moins à ce moment-là, il habitait chez ses parents et il n’avait pas fait les changements. Maintenant, il ne savait pas si l’un de ses parents aurait l’idée de donner l’actuelle, si l’une d’elles venait à se pointer chez eux.

- Oui, bien sur ! Commença-t-il par répondre. Mais entrez donc le temps que je cherche ma boite à outils.

Il s’effaça pour la laisser entrer chez lui. Peut-être qu’il n’aurait pas dû d’ailleurs. Que savait-il d’elle au juste ? Rien, hormis le fait qu’elle soit nouvelle dans l’immeuble. Cela dit, il ne se voyait pas la laisser sur le palier le temps qu’il cherche sa boite à outils.

Les voix et la porte qui se ferme, attirèrent l’artiste en herbe puisque la fillette pointa le bout de son nez :

- T’es qui ? Demanda-t-elle sans détour.

- Tess ? L’avertit son père. Tess, je te présente notre nouvelle voisine, Evelyn. Evelyn, je vous présente ma fille Tess, et je m’appelle Caleb. Fit-il les présentation, corrigeant une erreur par la même occasion puisqu’il avait omis de se présenter à la jeune femme.

- Tu veux voir mon dessin ? S’enquit-elle auprès de la nouvelle venue. Il est pour ma mamie, mais je peux t’en faire un si tu veux, dit-elle en guise d’excuse.

Tess attrapa la jeune femme par la main pour l’emmener dans le salon afin de lui montrer son œuvre.

- Je reviens, annonça le père de famille.

Autant profiter du fait que sa fille prenne le temps de s’occuper de leur voisine, pour partir à la recherche de cette fameuse boite.

*Si seulement je savais où Drew l’avait rangée !* Râla-t-il silencieusement.

Il fallait dire qu’il n’était absolument pas bricoleur, quand il avait un meuble à monter il invitait Drew et sa famille pour un diner. Cela dit, son père lui avait offert la boite du parfait petit bricoleur à la naissance de Tess en lui disant « Tu en auras besoin, fils ! ».

Heureusement que l’instituteur mit la main dessus quand il ouvrit la penderie qui cachait le cumulus d’eau chaude.

- Et la voici, annonça-t-il en le déposant sur la table de la cuisine. Vous pouvez me l’emprunter pour autant de temps qu’il vous sera nécessaire, annonça-t-il pour éviter de passer pour un abruti en cherchant dans le contenant et en sortant un outil qui n’avait rien à voir avec un tournevis. Est-ce que vous voulez un café ?

Chance ? C’était la carte qu’elle venait de tirer du Monopoly ! Oh, non, Evelyn ne se faisait pas déjà une mauvaise image des New Yorkais ou seulement des gens de l’immeuble puisqu’elle ne connaissait sa voisine de palier ! N’était-ce pas déjà la seule de New York qui lui avait donné une mauvaise image mais c’était tout !

Evelyn apprécia d’être enfin tombée sur ce type et qui d’ailleurs, accepta sa demande afin de l’aider. Il l’invita alors à entrer juste le temps qu’il aille chercher sa boîte à outils. La jeune femme entra alors, pas spécialement méfiante. Qui savait si elle se trouvait chez un psychopathe ? Pour l’instant, elle n’en avait jamais croisé !

Enfin à l’intérieur, Evelyn n’avait pratiquement même pas le temps d’observer un peu autour d’elle qu’une petite fille vint à sa rencontre, curieuse ! Evelyn ne prit pas mal le « T’es qui ? ». En fait, c’était dit d’une façon assez mignonne ! Bien que cela pouvait paraître impoli que son cher voisin reprenait un peu tout ça mais avant tout faisait les présentations. Au passage, elle apprit également l’identité de cet homme.

Enchanté ! fit-elle avant de se tourner vers la gamine : Enchantée, Tess ! Avec plaisir, montres-moi tes talents !

Bref, à vrai dire, ce n’était pas comme si elle avait le choix qu’elle se faisait déjà « adoptée » par la petite en se faisant entraîner là où elle faisait ses œuvres, pendant que le papa allait chercher la boite à outils. Arrivé dans le salon, Evelyn se baissa afin d’être à la hauteur de Tess et regarda son dessin.

Wouah ! C’est beau !

Quoique, Evelyn n’avait pas répondu pour le fait que la petite puisse lui faire un dessin pour elle. Ca la gênerait tout de même quelque peu d’accepter comme elle ne cherchait pas véritablement à s’imposer.

Ta mamie en a de la chance !

Généralement, les grands-mères adoraient ce genre d’attention, tout comme les parents, sans doute. Du moins, les mères en étaient souvent bien les plus fières ! Ca devrait bien être le cas ici, mais si elle n’avait pas encore vu une autre présence féminine.

T’es une petite artiste en herbe, complimenta-t-elle afin de l’encourager à continuer sur cette lancée.

Cette petite Tess était charmante. Evelyn aimait beaucoup les enfants, souvent par leur spontanéité. Et celle-ci respirait la joie de vivre. Quant à ce qu’il semblait être le père, il revint avec une caisse à outils. La jeune femme se redressa et se rapprochant de la table de la cuisine. Apparemment, elle pouvait l’emprunter le temps que cela lui était nécessaire.

Je vous remercie. Vraiment ! fit-elle reconnaissante. Je pourrais enfin monter mes étagères ! Quand il faut tout installer, ce n'est pas le plus amusant mais une fois que c'est fait, c’est pour une fois pour toute !

Cela dit, ce Caleb lui proposa aimablement si elle voulait un café. Un peu de compagnie ? pour en faire un peu plus connaissance ? Pour la bienvenue ? C’était tout à fait sympathique ! Cependant, Evelyn ne souhaitait pas imposer sa présence.

Volontiers ! Enfin, … je ne veux pas imposer ma présence ! Je vous ai peut-être interrompu dans quelque chose !? répondit-elle poliment.

Caleb l’avait invitée à entrer parce qu’il ne se voyait pas la laisser poireauter devant la porte d’entrée. C’était plus convivial et ça permettait également le bon voisinage. D’autant plus qu’il était père célibataire et qu’il était agréable de s’entendre avec ses voisins pour les urgences comme un peu de farine ou du sucre. Voir leur donner Tess à garder s’il ne trouvait aucune solution ou si la jeune Naëlle n’était pas disponible quand il la contactait à la dernière minute. Certes, il pouvait appeler ses parents mais ce n’était pas la solution.

Heureusement que sa fille n’était pas timide, - ce qui pouvait poser problème au Parc ou au supermarché quand elle se mettait à discuter avec des inconnus – elle engageait facilement la discussion avec leur visiteur. Apparemment, elle avait déjà adopté leur nouvelle voisine parce que très peu de gens avaient le privilège de voir ses chefs d’œuvre.

Tess s’installa sur la table basse et imita quelque peu son père en arrangeant le verre où était en train de tremper son pinceau.

Dessin numéro 1:

- C’est vrai ? demanda la fillette à sa nouvelle amie.

Il fallait dire que Tess n’avait pas l’habitude qu’on lui dise que ses dessins étaient jolis. Du moins que ce soit une femme de l’âge d’Evelyn. La fillette n’avait pas aucun contact avec sa mère vu qu’elle avait disparu du jour au lendemain quelques semaines après sa naissance.

Tess attrapa un stylo avant de demander quelque chose à Evelyn.

- Dis, tu peux marquer pour Mamie ? voulut-t-elle savoir après avoir gribouillé un petit « Tess » en bas à gauche. Papa, il serait capable de le garder pour lui !

Evidemment, comme Papa n’était pas loin il entendit sa fille faire cette remarque. Il se mit à sourire. Il l’avait fait une fois et ce n’était pas fait exprès, il avait mis le dessin à sécher sur le frigo pour l’amener à sa mère ensuite mais ils avaient oubliés l’œuvre sur le frigo.

Le jeune homme se manifesta au bout de quelques secondes. Sa voisine du dessous chercher ce dont elle avait besoin, et il fut amusé par la remarque qu’elle fit.

- Jusqu’au prochain déménagement, ne put-il s’empêcher de dire.

Ce qui n’était pas faux à vrai dire, il l’avait vécu quelques mois auparavant. Hélas pour lui, il avait tout le matériel du bricoleur mais ne l’était absolument pas. Heureusement pour lui que son collègue et meilleur ami l’était pour deux, puis ça permettait de passer du temps ensemble et de se faire une bouffe.

- Vous ne me dérangez pas, Evelyn ! Déclara l’instituteur en se dirigeant vers le placard ou se trouvait les tasses à café. Au fait, j’espère que ma fille ne fait pas trop de bruit le soir ou le matin lorsqu’elle courre dans l’appartement ? S’enquit-il, même s’il ignorait si c’était qui avait le logement juste en dessous de lui.

Caleb lui versa le liquide noir et fumant, et stoppa quand elle le lui dit. Il mit ensuite le sucre et le lait sur la table, parce qu’il ne savait pas si elle en prenait ou non. Il se remplit aussi une tasse et se mit un sucre et demi avant de se mettre à touiller. Il observait la nouvelle habitante de l’immeuble à la dérobée, et jetait de temps en temps un coup d’œil vers Tess qui avait déjà fini son second dessin.

Dessin numéro 2:

Une chose était sûre, pour Evelyn, les enfants, c’était des anges et Tess en était une. Ils étaient tellement innocents, purs, spontanés et sincères… Ils étaient loin de la réalité, loin de réaliser ce que leur vie pouvait les faire affronter ! Si on pouvait toujours être ainsi mais ainsi allait la vie ! N’était-ce pas par leur moment d’innocence qu’ils rayonnaient la vie des adultes ? Heureusement qu’ils existaient, cela dit ! Evelyn aimait beaucoup les enfants et ça se voyait !

Oui, ma puce !

Bien sûr que c’était vrai ! Les enfants n’étaient que des artistes. Du moins, il fallait qu’ils s’expriment et le dessin était un bon truc pour les occuper. D’ailleurs, la petite lui demandait si elle ne pouvait pas lui écrire le message pour elle sur son dessin.

Bien sûr !

Evelyn récupéra le stylo et de sa main droite, écrit quelques petits mots demandés.

En même temps, avec tes supers dessins, je comprends pourquoi ton Papa veut les garder, enchaîna-t-elle avec son sourire accroché aux lèvres.

Sur ce, après cet échange, Evelyn avait bien sûr reporté son attention sur son voisin et la boite à outils qu’il lui prêtait gentiment. Et d’ailleurs au passage lui proposait un café qu’elle ne refusa pas véritablement. Si ça pouvait faire genre comité d’accueil, au moins, c’était un meilleur accueil de la voisine d’à côté, et un accueil charmant. Evelyn était assise à la table, une tasse qui se faisait remplir de café, deux sucres qui s’ajouteront bien volontiers… C’était la pause café.

Merci !

Il n’y avait rien de mieux qu’un bon café pour enchanter un peu tout ça, surtout pour commencer une conversation, certes un peu banal mais au moins, ça permettait de faire connaissance.

Oh, ne vous en faites pas ! Je n’entends pas grand-chose !

Ce n’était pas faux !

Ca ne fait même pas un mois que je suis là. Le matin, je me lève tôt pour aller bosser donc je ne fais pas attention.

Bon, la petite devait également se lever tôt pour aller à l’école … mais c’était vrai qu’Evy ne faisait pas spécialement attention.

Votre femme est là ? demanda Evy innocemment.

Parce que la jeune femme avait l’œil mais elle le supposait. Un père, une petite fille… Le cliché d’une famille et pour la jeune femme, c’était tout à fait logique. Si elle pouvait au passage connaître toute la petite famille. Cela dit, depuis son arrivé, rien ne laissait entendre de la part de la part de Caleb, ni de Tess, qu'il y ait une présence féminine, mais comment le deviner?

Tess était toute heureuse. Un adulte autre qu’un membre de sa famille lui disait qu’elle était une artiste. Les compliments étaient toujours bons l’estime de soi, mais il fallait tout de même ne pas en faire trop sous peine de lui donner trop confiance en soi ou devenir une pimbêche. La modestie était une qualité mais bon, pour l’instant c’était une enfant pleine de vie avec son petit caractère. A savoir qu’elle trouvait toujours le moyen de faire flancher papa avec un sourire, un regard et des mots. Tess avait beau avoir 5 ans, mais elle savait ce qu’elle voulait et parvenait à ses fins. En ce moment, le mot « tortue » revenait souvent sur le tapis.

Enfin bref, Caleb était parvenu à mettre la main sur la boite à outils et venait de servir le café. Il était en train de touiller le sien, tout en questionnant sa nouvelle voisine. Le père qu’il était, était inquiet que sa fille unique fasse trop de bruit le soir ou le matin et que ça ne dérange Evelyn. Bien sûr, il veillait à lui rappeler qu’ils vivaient dans un immeuble, qu’ils avaient des voisins dessus et dessous, mais c’était une enfant de 5 ans. Il ne pouvait tout de même pas l’attacher sur une chaise.

- Merci, commença-t-il par répondre soulagé de ne pas faire un boucan monstre. Enfin, n’hésite pas à me le dire si ça venait à se produire ! Déclara-t-il.

Comme ça, il pourrait faire en sortant de faire moins de bruit. Puis, ça permettrait aussi d’entretenir une bonne relation de voisinage. Le jeune homme jeta un coup d’œil à sa fille qui dessinait toujours en regardant la chaine pour enfant. Caleb ne fut pas réellement surpris par la question d’Evelyn.

- Je suis père célibataire, répondit l’instituteur. Ce n’est pas évident tous les jours mais je fais de mon mieux.

Il ne savait pas trop comment expliquer la situation mais il n’avait pas menti sur son statut. Il disait également vrai que ce n’était pas facile, certains mois étaient beaucoup plus rude que d’autres. Pourtant il faisait de son mieux pour ne pas que ça se répercute sur sa fille, lui expliquait avec des mots adaptés quand cela était nécessaire. Et il avait la chance d’avoir ses parents près de lui pour le relayer quand il avait besoin de son aide, en journée notamment parce qu’en soirée, il faisait appel à des baby-sitters.

- J’ai la chance d’avoir une enfant facile, même si elle a son petit caractère, renchérit-il. Par exemple en ce moment, elle me tanne pour avoir une tortue.

Il y avait de forte chance qu’il craque sans tarder.

- Et vous, vous avez de la famille dans le coin ? Voulut-il savoir.

Evelyn lui sourit. Elle n’hésiterait pas à se plaindre alors à l’occasion, si un de ces quatre, elle était en congé et que la petite avait école… Quoique pas qu’Evelyn ne se levait pas super tôt mais presque puisqu’étant du Bronx et venir à Manhattan pour bosser, ça faisait une trotte quand même, mais cela dit, ça faisait plaisir d’avoir un voisin aussi ouvert. Coup de bol ! Evelyn aurait très bien pu tomber sur un voisin comme sa voisine de palier mais non, pour dire, Caleb rattrapait le coup. Il lui semblait pour le moment la sympathie incarnée. En tout cas, à lui demander où était passée sa femme, Evelyn bloqua.

Ah ! J’ai fait une bourde ? ne put-elle s’empêcher de dire.

Quoique bon, il ne semblait pas du tout mal le prendre puisqu’il semblait lui répondre honnêtement sans que ça puisse véritablement le gêner mais bon, sans le vouloir, elle était peut-être tombée sur un sujet tabou. Si sa femme était morte par exemple où elle ne savait vraiment ! Qu’elle fasse son indiscrète… pas trop son genre ! Pour le coup, Evelyn leva la tasse à ses lèvres et pour dire, selon elle, une boisson chaude était toujours un remède psychologique.

Elle me semble bien adorable !

Oh, c’était certain qu’Evelyn ne préférait même pas imaginer ce que ça pouvait être d’élever un enfant seul. Ca ne devait pas être évident mais à regarder la petite, elle ne lui semble pas malheureuse. Et quant à lui, elle lui semblait être un père extraordinaire ! En tout cas, bienveillant vu la manière dont il pouvait la surveiller. C’était assez chou !

Vous me semblez bienveillant ! observa-t-elle. Comme tout parent, vous faites ce que vous pouvez…

Et de ce fait, c’était ce qu’elle voyait… Cependant, elle ne pouvait repenser à ses propres parents qui avaient pratiquement tout fait pour essayer de communiquer avec elle depuis la mort de sa sœur mais depuis ce jour-là, ça avait été chaotique…  Certes, elle était toujours en contact avec eux même si ce n’était pas trop ça. Bon, Evelyn n’avait pas cinq ans mais avoir toujours son propre père auprès d’elle, oui, ça lui manquait. Pourtant, il n’était qu’à 700 miles d’ici et elle avait fui récemment.

Je suis sûre que vous allez résister… fit-elle dans un sourire pour la tortue.

Mais cela dit, résister ou pas, c’était lui qui voyait… Hum, quant à elle, si elle avait la famille dans le coin… Une autre gorgée de son café avant de répondre… honnêtement !

Non, j’n’ai personne ici. Ma famille est restée à Louisville !

Et elle, elle était partie, tout simplement… Bon, elle n’allait pas expliquer qu’elle était partie pour repartir sur de bonne base depuis le décès d’Irene.

J’suis venue là pour le boulot ! continua-t-elle. New York le faisait bien pour ça bien que ça ne me change pas trop de Louisville.

Bon, Evelyn anticipait bien sûr. C’était la vérité mais ce n’était pas la véritable raison de son départ bien qu’elle en avait profité de cette raison.

Et vous? Ca fait longtemps que vous ici ?

A savoir combien de temps était-il dans cet immeuble, à voir s'il s'entendait bien avec le voisinage...

Vous connaissez un peu le voisinage? s'intéressa-t-elle.

Au début, ça avait été dur pour lui d’en parler mais plus aujourd’hui. Même s’il ne comprenait pas qu’on puisse abandonner son enfant, Caleb lui ne regrettait d’avoir Tess. C’était son petit Trésor et pour rien au monde il ne prendrait une autre décision que celle prise cinq ans auparavant.

- Absolument pas, tenta-t-il de la tranquilliser. La séparation s’est fait sans heurt, la mère Tess nous a quitté parce qu’elle ne se voyait jouer ce rôle. Je préfère qu’elle ait pris cette décision à ce moment-là, plutôt qu’aujourd’hui.

Oui c’était une façon de voir les choses. Du moins, Tess n’avait pas l’impression d’être fautive par la situation. Puis, il n’y avait pas réellement ce manque causé par l’absence de celle-ci. Ceci dit, Caleb avait parlé d’Isadora à Tess, il avait même mis une photo d’elle dans un cadre pour la mettre dans la chambre de la fillette. Ce n’était pas une raison de la punir elle, pour la décision de sa génitrice.

Ces mots étaient venus naturellement, alors qu’il se pensait incapable d’expliquer la situation auparavant. Même Tess aurait plus le faire si elle avait entendu l’interrogation, avec les mots d’une enfant de cinq ans.

Il se gratta le menton, gêné par le compliment. Certes, ce n’était pas grand-chose mais il était fier de savoir que sa fille était adorable. Et plus ou moins fier du travail qu’il accomplissait en l’élevant. C’était gratifiant, et lui démontrait qu’il ne s’était pas trompé de voie en devant instituteur.

- J’essaie de résiste mais ce n’est pas évident, quand elle s’amuse à faire la spécialiste des tortues ou des dessins de ces dernières ! Reconnut-il. Enfin, j’avoue qu’aujourd’hui le thème a l’air d’être « Papa et sa fille chérie ».

Tess poussait le vise à se déguiser en princesse et jouait à l’élection de Miss USA. Elle faisait un discours sur la sauvegarde des tortues. D’ailleurs, il ne savait pas d’où elle avait été pêcher cette idée.

- J’ai bien peur que mes parents cèdent avant moi, vu qu’elle leur joue le même numéro !

Pas folle la guêpe. Elle avait compris que ses grands-parents faisaient souvent au gré de ses fantaisies pour combler cette absence. Il avait beau eu râler à ce sujet, argumentant sur le fait qu’elle allait devenir capricieuse et attiser la jalousie de ses cousins.

Ensuite, il écouta les réponses qu’elle lui fit sur sa famille et son lieu de résidence. Cette jeune femme était bien courageuse de partir aussi loin des siens mais avec le chômage, aujourd’hui on n’avait plus vraiment le choix. On prenait les postes qu’on nous proposait, même si on était envoyé à l’autre bout du pays. Cela dit, il mit dans un coin de sa tête qu’elle était seule dans cette ville immense, peut-être qu’il pourrait lui demander de se joindre à Tess et lui, lors d’une de leur promenade au Parc.

- Je suis originaire de New-York, mes parents habitent dans le coin ! Finit-il par dire. Autrement j’habite l’immeuble depuis le mois de novembre.

Ca faisait juste quelques mois qu’il avait emménagés ici, mais il ne connaissait pas encore tous ses voisins.

- L’épicerie du coin, la pizzeria, la laverie automatique… Et dans l’immeuble, on ne peut pas louper la sorcière qui est votre voisine de palier. La vieille carne vous tombait dessus sans crier gare. A chaque fois que Tess l’aperçoit, vous pouvez être sure qu’elle fait des cauchemars la nuit même.

- Papa, c’est l’heure du gouter ? Demanda la dénommée Tess, tout en grimpant sur les genoux de Caleb.

Le père de famille jeta un coup d’œil à l’heure, sur l’horloge du micro-onde. Il posa une main sur le front de son enfant pour voir si elle avait un peu de fièvre.

- Non, ce n’est pas encore l’heure mais si tu veux un diabolo-fraise, je t’en fais un.

- Un diabolo-menthe ! Dit-elle en descendant de ses genoux pour qu’il puisse la servir. Papa tu peux mettre Rebelle ?

- Evelyn je vous laisse le temps de mettre le dvd à ma fille, annonça-t-il en quittant la pièce avec le diabolo qu’il venait de faire.

Quand il fut de retour dans la cuisine, il tenait les dessins de sa fille et la palette de peinture dans une main et le verre d’eau dans l’autre.

- Nous en étions où ? demanda-t-il parce qu’il avait un peu perdu le fil de leur discussion.

Savait-on jamais si elle avait fait une bourde ! C’était connu qu’aujourd’hui, il y avait certaines relations un peu compliquées, des couples qui se déparaient se trouvant mère célibataire ou père célibataire comme elle avait devant elle, ce qui était un peu plus rare. Aussi rare qu’une femme n’assumant pas son rôle de mère dès la naissance de la petite… Evelyn n’était pas là pour juger en quoique ce soit mais elle imaginait bien que ça n’avait pas dû être évident pour Caleb de se trouver seul du jour au lendemain.

Je vois ! répondit-elle avec un petit sourire un peu confus tout de même malgré le fait que cette histoire soit un peu indiscrète.

Au moins avait-elle pu tout de même remarquer qu’il s’en sortait comme un chef. Il fallait être aveugle pour ne pas voir comment il pouvait aimer sa fille et ils étaient loin d’être malheureux. C’était tout à fait l’impression qu’elle avait.

De temps à autre, cela ne fait pas mal de faire un peu plaisir et de céder à certains caprices. Bien qu’une tortue ne soit pas un chien, il faut quand même apprendre à s’en occuper. - En réfléchissant deux secondes… - Je crois que vous êtes plus chanceux qu’elle ne vous demande pas un chien.

Un chien était loin d’être une peluche. Il fallait s’en occuper tous les jours : le nourrir, le sortir… Alors qu’une tortue était bien du genre tranquille. D’autant plus qu’elle était bien du genre à hiberner une bonne partie de l’année. Evidement, à ses paroles, Evelyn ne tentait absolument pas Caleb à céder, hein ! Non, non et non ! Après tout lui, c’était lui le représentant légal donc c’était lui qui décidait de ce qu’il voulait faire. La jeune femme débarquait seulement et ce n’était pas pour donner des leçons, loin de là.

Sur ce, la conversation dériva pour faire un peu plus connaissance. Evelyn apprit alors que son voisin était un pur New Yorkais. Et bien si tous les purs New Yorkais étaient tout aussi accueillant, c’était plutôt agréable. Il avait emménagé dans l’immeuble quatre mois plus tôt. Et bien effectivement, c’était tout récent. Moins récent qu’elle mais c’était récent. En tout cas, si elle avait besoin d’informations, elle saurait chez qui frapper si elle se perdait. Cela dit, quand Evelyn lui demanda pour le voisinage, voilà qu’une apparaissait et qu’elle connaissait « bien ».

Ah elle … Je comprends ! réagit Evelyn.

Pas qu’elle allait faire sa commère mais ça n’allait sans doute pas tarder. Elle n’était donc pas la seule à imaginer que sa voisine avait un grain ? Elle comprenait parfaitement pourquoi elle faisait peur à Tess car cette voisine lui foutait froid dans le dos à elle aussi. Sinon évidemment, Evelyn ne se trouverait sans doute pas chez son voisin du dessus que sa voisine de palier.

Le peu que je l’ai vu, elle m’a foutu froid dans le dos… Quand je suis arrivée, j’étais seulement dans les escaliers hein… ben je me suis fait engueulée seulement parce qu’on ne veut pas qu’on touche à son paillasson…

Evelyn n’avait jamais vu une voisine aussi space mais bon, tant qu’elle ne la croisait pas, tout allait bien ! Bon, il semblerait que la petite avait faim. Elle était mignonne à être aussi proche de son père, à monter sur ses genoux. En tout cas, Caleb s’excusa un instant le temps d’installer sa fille devant un dessin animé avec une boisson. Il était chez lui, non ? Il n’allait pas s’excuser.

Je vous en prie...

Enfin bref, si ce n’était qu’une question de cinq minutes, Evelyn n’était pas à ça près. Elle était en congé aujourd’hui et elle était là pour monter ses meubles. Après que son voisin s’est occupé de sa fille, il revint alors à elle pour continuer la discussion.

On parlait de voisinage…

Après tout, il ne connaît pas forcément encore tout le voisinage, excepté la vieille sorcière où ils étaient d’accord.

Vous faites quoi dans la vie ? s’interessa Evelyn.

Quoi qu’il en soit, il n’était pas offusqué d’avoir évoqué ce sujet avec Evelyn. Au contraire, il y aurait à présent une personne ayant connaissance de sa situation. Pas qu’il souhaitait qu’elle aille le crier sur tous les toits, juste si elle entendait des bruits de couloir afin de rétablir la vérité. Enfin pas qu’il pensait que ça se réalise mais ne savait-on jamais. Apparemment, c’était la jeune femme la plus mal à l’aise des deux.

Ensuite la discussion bascula sur Tess et la tortue qu’elle voulait avoir. Oui, l’animal donnait beaucoup moins de travail qu’un chien. Mais sa fille agirait comme tous les enfants, au début tout roulait à la perfection et après ça serait lui qui serait de corvée. Après tout, ne l’avait-il pas fait enfant quand il avait eu son hamster « Robocop ».

- J’y ai déjà eu droit au chien, avoua-t-il. Comme au poney ce pourquoi on l’a inscrite à l’équitation, au dauphin pour mettre dans la baignoire. Il y a aussi eu le perroquet pour qu’elle puisse lui apprendre à parler.

Peut-être que sa fille regardait un peu trop les reportages animaliers. C’était bien parce que ça lui apprenait plein de choses et à s’intéresser à autre chose qu’au jeu vidéo ou à ses barbies. Et il s’attendait à un moment ou à un autre à avoir la question « Papa comment on fait les bébés ? », de toute façon, il faudrait bien qu’il y passe un jour. Autant que ça arrive maintenant qu’au moment de l’adolescence, déjà qu’il aurait d’autres problèmes à gérer : les garçons, les premières règles… C’était généralement avec sa mère qu’une fille abordait ses thèmes, pas avec son père.

Bref la conversation dévia à nouveau sur leur voisine. Elle devait avoir au moins 100 ans, une verrue sur son nez crochue. Enfin peut être pas, mais elle effrayait sa fille et lui donnait froid dans le dos.

- Elle ne doit pas avoir beaucoup de gosses qui frappent à sa porte le soir d’Halloween, dit-il.

Il disait ça mais il ignorait s’il y avait d’autres enfants dans l’immeuble et si les voisins fêtaient Halloween. Toutefois, il s’y intéresserait le moment venu pour savoir comment faire avec Tess pour cette année. Mais, si oui, il éviterait cet appartement pour ne pas avoir à faire avec la sorcière. Du moins, elle n’avait pas beaucoup à dépenser en costume vu qu’elle y ressemblait à s’y méprendre avec ses robes noires.

- Pour ma part, j’ai eu un courrier dans la boite aux lettres pour me dire que ma fille mettait des traces de doigts sur la glace de l’entrée.

Enfin, il serait idiot de mentir à ce sujet. Oui, Tess avait laissé des traces au début, après tout c’était une fillette, mais quand il s’en était rendu compte il avait nettoyé derrière elle.

Il se leva pour s’occuper de son Trésor, s’excusant auprès de son invitée puis revint vers elle pour poursuivre leur discussion. Il voulut savoir où ils en étaient parce qu’il avait un peu perdu le fil durant son absence.

- Il faudrait peut-être qu’on écrive un guide pour les nouveaux arrivants, s’amusa-t-il à dire.

Comme ça, ça leur éviterait d’avoir des surprises quand ils tomberaient nez à nez sur la femme en question.

- Je suis instituteur en dernière année de maternel, et vous, vous travaillez dans quoi ?

Ah les enfants ! On ne les referait sans doute pas ! Tess devait sacrément aimer les animaux. Peut-être qu’un jour, elle se retrouverait vétérinaire ou à travailler dans un zoo. Qui savait ? Bon, elle était petite donc elle avait le temps de grandir encore… Cela dit, la conversation dériva sur la vieille mégère du dessous. Non, tous les deux ne semblaient pas du tout l’apprécier.

A part ça, elle est charmante ! lâcha-t-elle avec humour.

Une chose que la vieille mégère ne savait pas était qu’elle avait poussé Evy à voir son voisin du dessus qu’elle. Au moins, si elle avait un souci, si elle pouvait manquer d’un petit truc, elle ne serait sans doute pas trop gêner à venir comme elle était venue pour chercher un tournevis… D’avoir de bonnes connaissances dans l’immeuble pouvait rassurer pour ne pas trop se sentir seule.

Evelyn laissa alors un moment son interlocuteur s’occuper un instant de sa fille pour qu’elle reste un peu place pendant qu’elle s’occupait de son café encore chaud. Ca serait bête que ça se refroidisse. Peu de temps après, Caleb revint et elle, elle n’avait pas bougé. Ils purent continuer leur conversation tranquillement.

C’est une idée !

Mais bon, contre cette vilaine voisine, ça serait méchant de créer un guide ! Il ne manquerait plus qu’elle se venge pour les virer des appart…

Tant que ça n’aille pas plus loin et que tout reste tranquille, ça va !

Evelyn était quand même du genre à se faire discrète quand même et tant que la vieille mégère reste enfermée dans son appart et qu’elle ne la croise pas, ça allait. Et comme Evelyn partait tôt et rentrait parfois tard, elle s’en fichait un peu pour le moment.

Instituteur ? Je comprends mieux alors votre bienveillance envers votre fille ! fit Evy avec sourire.

Puis évidemment, à ce genre de question, il y avait question retour.

Je travaille au musée d’Histoire Naturelle ! Ca fait une petite trotte jusqu’ici.

Le fameux musée qu’on ne pouvait pas louper dans le quartier de l’Upper West Side, face à Central Park à Manhattan. Mais ca allait, ce n’était pas comme si ça ne lui plaisait pas comme boulot. Le tourisme, Evy aurait pu trouver n’importe où, comme travailler à Louisville ou dans l’Indiana comme elle adorait y aller mais ce n’était pas possible. C’était trop pour elle. Elle était plutôt bien ici à New York. Ca changeait d’air.

J’essayerai de repasser pour vous rendre votre caisse à outils. Si je mets un peu trop de temps, n’hésitez pas à passer ! Avec le boulot tout ça, on pourrait se manquer.

L'air de rien, ça invitait à ce qu'ils se revoient de temps à autre.

Ils avaient un point en commun : la vieille peau de l’immeuble. Chaque immeuble avait son cas, mais cette dernière était hors catégorie. Elle effrayait aussi bien les enfants que les adultes. C’était peut-être pour ça qu’il n’en avait pas vu à part sa fille. Enfin Caleb n’en mettrait pas sa main au feu, il ne connaissait pas les autres occupants, même s’il les croisait de temps à autre.

Un nouveau sourire s’empara de ses lèvres quand elle lui dit que c’était une bonne ce petit guide. Certes ni l’un ni l’autre n’irait jusque-là, ne serait-ce pour la relation de voisinage. Puis, ils évitaient le retour de bâton en se comportant comme des locataires modèles et aimables.

- Comment savoir si ce n’est pas elle qui fait fuir les locataires ? Dit-il simplement, il était possible qu’ils prennent cette décision de peur de commettre un meurtre. J’ai entendu parler déménagement, il y a peu mais je suis bien incapable de dire où en avoir eu vent !

Après tout, il était humain et non un robot pour retenir toutes les informations qu’il captait ici et là. Puis, il avait également d’autres choses à penser comme les corrections des exercices qu’il donnait à ses élèves (enfin ça ce n’était pas le plus difficile, il lui suffisait de mettre une gommette de couleur : rouge, orange ou verte, les notes étaient réservées pour les parents), payer le loyer, quoi faire à diner et si les courses étaient à faire, s’il devait aller à la laverie pour faire une machine… Heureusement qu’une personne avait trouvé le concept des repas livrés à domicile, certains soirs il commandait chinois, indien, italienne, pizza, quand il ne passait pas chez Ronald pour un repas bien gras avec pleins de sauce en accompagnement.

- J’agis de la même façon avec mes élèves, mais je suis quand même un peu moins papa-poule, reconnut-il.

Il apprit par la suite qu’elle bossait au musée. Certes ce n’était pas à coté mais avec les transports en commun ou le co-voiturage, on pouvait aller d’un point A à un point B assez facilement. Enfin, quand il n’y avait pas de grève. Ça pourrait lui donner une idée de sortie de le savoir, elle pourrait peut-être l’aider à l’organiser quand il se déciderait à la mettre en place. Déjà, il fallait laisser passer la journée des parents, chaque enfant devait faire venir un parent pour parler de son travail. Ils ne comprendraient probablement pas les trois quart des choses, mais son père ou sa mère serait son héro pour la journée.

- Ne vous inquiétez pas pour ça, vous pouvez la garder le temps que vous en aurez besoin, répondit-il, se saisissant l’invitation dans un premier temps. Mais je n’hésiterai pas si je me retrouve confronté à une fuite d’eau.

En espérant que ça ne se produirait pas parce qu’il serait bien dans la mouise, Caleb et le bricolage ne faisaient pas bon ménage.

Ayé, à peine ils se connaissaient, ils allaient commencer à faire les commérages du voisinage ! Non, sérieusement, Evelyn n’avait pratiquement jamais vu une femme aussi vicieuse. Enfin cela l’avait bien surprise le coup du paillasson mais la jeune femme se sentait beaucoup moins seule sur ce coup.

Peut-être !

Qui savait si cette « sorcière » n’était pas la cause de ses départs. Enfin, ça, Evelyn ne savait tous les détails et si c’était réellement vrai. Elle venait de débarquer, ce n’était pas comme si elle avait vu tous ces changements. Une chose était certaine, comme elle venait de débarquer, Evy n’espérait pas repartir aussi vite.

J’n’espère tout de même pas que ça me fera partir ! fit Evy. Je compte monter mes étagères, ce n’est pas pour les défaire demain !

Le fait que Caleb soit instituteur, dans le fond, ne l’étonnait même pas. Bon, en même temps, vu la manière dont il agissait avec sa propre fille, cela ne signifiait pas autant qu’il agissait tout à fait pareil avec les autres enfants, car évidemment la seule différence étant que ceux-ci n’étaient pas les siens. Logique ! Mais en tout cas, c’était fort bien mignon. D’autant plus que Tess était vraiment adorable.

Une fuite d’eau ? J’espère pas !

Hey oh ! Il ne fallait pas trop charrier parce que bon, ce n’était pas comme si elle vivait en dessous mais presque ! Elle ne souhaitait avoir un appartement trempé. Enfin que cela n’arrive pas ! Humour, humour ! Sur ce, il fallait bien une fin à tout ceci.

Et bien merci pour votre aide et surtout pour votre accueil ! Vraiment !

Oui, c’était véritablement sympathique et agréable à la fois.

Je vais vous laisser, bien que votre présence soit agréable mais mes étagères ne vont pas se monter toute seule. Faut que je profite que je sois un peu en congé pour ça ! fit-elle en souriant.

Au passage, Evelyn salua la petite avant de s’en aller. On dirait aussi que la petite ne voulait pas la laisser s’en aller, quoiqu’en tout cas, Tess se ferait une joie de revoir la voisine. C’était ce qu’Evelyn comprenait très bien ! Elle embarqua alors la caisse à outils et s’en alla. Dans la cage d’escalier, elle n’avait qu’à descendre d’un étage pour être enfin chez elle, et très rapidement. Les outils alors en main, elle pouvait alors commencer les bricolages et le rangement… C’était sûr, la jeune femme ne risquait pas de s’ennuyer.