A la recherche d'un guide [Terminé]

Depuis son arrivée à New York, il est vrai que Jason était plus occupé à découvrir la ville qu'autre chose. En même temps il y avait tellement à voir, qu'il se demandait si d'ici un an, il aurait fini d'en faire le tour ! Et puis elle était sans cesse en changement, alors … Mais ça lui allait très bien, ne pensez pas le contraire. Et quand il allait à un endroit, qu'il le trouvait beau, ou intéressant, il se disait qu'il allait y revenir avec son appareil photo pour quelques clichés. Ça allait être la même chose pendant un long moment. Son quotidien ne sera pas fait que de ça bien sûr. Il y aura des jours entiers ou il ne sortira pas, trop absorbé par l'écriture, des jours ou il sera occupé à donner des interview papier ou télévisées, des autres ou il y aura des imprévus … C'est ainsi que va la vie.

Et aujourd'hui Jason avait un objectif précis : The High Line. Il en avait entendu parler d'ici et la. Il s'agissait d'une ancienne voie ferrée, qui avait par la suite été convertie en un parc à ciel ouvert. Il paraissait que c'était un coin de verdure, parfait pour une balade, pour se promener, y manger un quelque chose, mais ce qui intéressait aussi Jason, c'était de pouvoir photographier cet endroit. Un jardin surélevé, il voulait voir ça ! Ou un parc surélevé plutôt. C'est la raison pour laquelle, il était la, au milieu de la rue, enfin sur le trottoir, avec en bandoulière son sac contenant son appareil photo chéri, en quête de cet endroit.

C'est plein de courages et d'espoir qu'il cherchait à y aller. Avant de partir il avait tout de même regardé un peu ou c'était, comment s'y rendre et quel chemin emprunter pour cela. Sur le papier, ça lui avait semblé très simple alors après un coup d'oeil il avait fermé tout ça, se disant que c'était bon il allait y arriver sans problème. Dans les faits c'était un petit peu plus compliqué. En fait, il avait beau avoir vu des photos du trajet, impossible pour lui de savoir en fait par ou aller. De la Namibie ou aux Etats Unis, ou plus précisément New York, le changement était assez fort. Bon … pas de quoi se prendre la tête non plus. Il allait finir par trouver ces voies ferrés fleuries à la noix non ? Et pour ça, il se dit que le plus simple, ce serait de choper un New Yorkais au vol, et de lui demander. En espérant que la personne qu'il interroge sache ou ce soit. Hum … cette famille d'asiatiques en train de photographier ses gamins dans le parc ou il s'étiat paumé, peut être pas. Cet homme assis sur le banc peut être ? Oui, il allait tenter le coup. D'un pas décidé, Jason se rapprocha de l'homme. Arrivé à sa hauteur, il pencha un peu le haut de son corps et le regarda avec un sourire aimable :

- Excusez-moi ?

Une fois qu'il eu l'attention de l'homme, Jason se permit de continuer dans la foulée. Les gens ici, de ce qu'il avait pu voir, n'étaient pas tous très patients ou n'avaient pas le temps de parler aux inconnus dans la rue. Triste !

- Je recherche The High Line, vous connaissez peut être ? Enfin, je recherche mais j'ai l'impression de tourner en rond tout en étant proche pourtant !

Si c'était pas frustrant ! Il n'avait pas de problème d'orientation, mais quand on ne connait pas la ville, et donc pas les quartiers, tout a tendance à se ressembler. L'intérieur de sa tête, ce n'était pas une carte interractive !

Journée de repos pour moi aujourd’hui. J’avais cumulé pas mal d’heures supplémentaires du coup on m’avait forcé à prendre ma journée. Pour pas resté enfermé chez moi j’étais sorti prendre l’air.  A déambuler comme ça dans les rues j’avais fini par atterrir dans un parc sur un banc. L’endroit était calme, peu de gens, pas trop de gamins bruyant, quelques touriste de temps en temps, d’autres gens étendus sur des couvertures… Je m’étais perdu dans mes pensées savourant le beau temps. Evelyn était morte il y a plusieurs moi de cella et pourtant j’avais toujours un vide quelque part. Je la chassais de mes pensées me focalisant sur des choses plus agréables.

Le fait d’avoir revu Zack par exemple. Je l’avais revu il y a quelques jours à peine. On avait décidé d’aller boire un verre ensemble prochainement. Enfin je ne l’avais pas encore contacté. Mais on devait se revoir… Apres neuf ans d’absence. J’avais peur de ne pas savoir quoi dire. On avait été proches. Dans le style meilleur ami mais bon … Il s’était passé un tas de trucs. Il avait perdu sa compagne, j’avais été en prison, j’avais perdu ma compagne, il était devenu cartomancien. Au moins si je ne savais pas quoi dire je pouvais toujours évoquer notre deuil commun ! En fait je crois que j’avais un peu peur de me rendre compte que le Zack que j’avais connu n’existait plus. Il est clair qu’on devait réapprendre à se connaitre mais à quel point neuf ans peuvent changer une personne ? Enfin je suppose que je verrais bien au moment venu. Je m’étais mis à jouer avec la carte de visite de Zack justement, hésitant à écrire maintenant quand ‘un coup on m’accosta.

Je relevais la tête et plissais un peut les yeux ayant le soleil face à moi. Un gars avec un sourire aimable. J’avais toujours du mal quand les gens m’accostaient spontanément. Je n’y étais plus habitué. Mon premier reflex était de demander : « qu’est-ce que tu me veux ? » Mais j’avais appris à me retenir. Enfin il ne me laissa pas le temps de réagir. A peine la tête levée qu’il continua de parler. Expliquant de la même,  ce qu’il me voulait. The High Line. J’avais l’impression de me choper un coup de poing à l’estomac alors que le rire d’Evelyn résonnait à mes oreilles. C’est vrai que ce n’était pas loin tient.

« Je connais oui, suffit de traverser le parc, vous traverser vers la rue avec la maison rouge la bas, vous prenez à droite et ensuite c’est la première à gauche. »

Ma vois n’était pas spécialement joyeuse, mais au moins elle n’était pas désagréable non plus ! Je faisais des progrès : je m’exprimais autrement qu’en grognant ! Je notais qu’il avait un appareil photo sur lui. Intrigué je ne pus m’empêcher de remarquer :

« Vous êtes photographe ? »

Non mais il ne ressemblait pas aux touristes classiques, pas d’accent marqué non plus. Il ne regardait pas tout autour de lui, ne photographiait pas non plus tout du coup. Et puis bon je risquais quoi de faire un brin de causette avec un inconnu ? Surtout si cet inconnu retardait un peut l’échéance de faire face à Zack. J’appréhendais le fait de découvrir ce qu’il était devenu, ce qu’il lui était arrivé…

Le type face à lui ne respirait pas la sympathie, pas au premier abord en tout cas, mais ça importait peu. Tout ce que Jason voulait, c'était savoir si l'homme savait comment se rendre à The High Line, et après, promis, il le laissera tranquille. Peut être qu'il le dérangeait. Qu'il attendait quelqu'un, avait rendez-vous ou autre, et le dérangeait ainsi dans sa vie. Mais il oublia tout ça quand l'homme lui dit connaître, et lui dit ainsi même comment s'y rendre.

- A droite et la première à gauche … compris ! Merci beaucoup.

C'était bien sa veine que d'être tombé sur un homme sachant ou ça se trouvait et comment s'y rendre. Il allait laisser l'homme tranquille, quand il lui posa une question, ayant remarqué son appareil photo. Sa question était légitime, même s'il ne savait pas si ça l'intéressait plus que ça.

- Techniquement oui.

Ce fut réellement son métier pendant un moment. Ce pourquoi il avait fait de telles études aussi. Ses clichés avaient été publiés dans un magasine géographique, et avait vécu de ça pendant un temps. Donc oui, il pouvait se dire photographe, puisqu'il l'était. Ce n'était pas mentir, mais en même temps, plus vraiment d'actualité.

- Mais d'un autre coté …. non. Parce que ce sont des clichés pour mon propre plaisir et que les photos que je prends, je les publie sur mon blog personnel et je ne les vends plus à un magasine. Et vous savez quoi ? C'est bien mieux ainsi.

Et pas qu'un peu ! Avant forcément il avait des thèmes à respecter, des lieux ou il devait aller pour tel ou telle chose. A présent qu'il vivait de ses romans, il était libre de photographier ce que bon lui semblait ! Et ses clichés, il en faisait aussi ce qu'il voulait. A présent, une fois qu'il avait prit des clichés, il faisait un petit tri de base pour se décider lesquels publier. Ensuite quelques petites retouches pour équilibrer la lumière, l'éclairage, afin que le tout soit harmonieux, puis les publiait. Au fil du temps, il avait classé ses photos d'abord par pays, ensuite par ville. Et dans ces villes, il y avait plusieurs sous dossiers. Sous peu, il y en aura un sur The High Line. Réalisant le petit récit qu'il venait de lâcher, il regarda l'inconnu.

- Voila pour la petite histoire....

Ajouta t-il avec un haussement d'épaules. L'homme n'avait rien demandé du tout, juste s'il était photographe, et à la place, il lui racontait sa vie. Normal.

J’indiquais le chemin au gars qui m’avait accosté. En soit ça aurais pu se terminer là mais non j’avais « engagé la conversation ». Si poser une question était engagé la conversation. C’était lâche quand même de fuir ses propres démons en parlant à un gars inconnu, qui n’avait peut-être pas le temps ou l’envie de parler. Je fus presque étonné quand il me répondit. La majorité des gens ici étaient froid, distant, dans leurs bulles et détestaient être accosté avec des questions plus « personnelles ». Enfin pas que la question était fortement intrusive mais ça en aurait déjà choqué plus d’un.

« Techniquement ? »

Je le regardais perdus, donc oui mais non ? L’explication vint rapidement au final. Je comprenais ses motivations. Le fait de ne pas pouvoir photographier ce qu’il voulait, si c’était un truc qu’il aimait faire, ça devait être rageant à la fin. Je fis un léger sourire. Cependant ce gars avait attisé ma curiosité. Il ne semblait pas vivre une vie classique et ça m’intriguait.

« Ça doit être plus agréable en effet ! Mais les magazines sont si chiants que ça ? »

J’étais curieux. Kyle me parlait déjà des technologies actuelles, mais j’étais vraiment à la masse. En huit ans des youtubeurs avaient fait leur apparition, les gens faisaient des blogs et gagnaient leur vie avec des tutos variés. Cela me dépassait légèrement, même encore aujourd’hui. Je ne comprenais pas comment on pouvait gagner sa vie en donnant des conseils de beauté ? Faire des études d’esthéticienne oui ok, mais se mettre devant la caméra et montrer comment on se met trente couches de peinture sur le visage c’est abusé non ? Bon j’avoue que d’un autre côté venant du Texas, mes parents ayant un Diner, j’avais toujours été éduqué avec la visions qu’un travail qui rapporte est un travail qui coute des efforts et des sacrifices alors que la… Enfin bon j’avais déjà pas mal rattrapé mon temps perdu en prison, je comptais même m’acheter un smartphone prochainement. Alors qu’il hochait les épaules la question suivant m’échappa.

« Et vous photographier quoi exactement ? Un peu de tout ou juste des plantes, ou des endroits ? »

Pas que je dénigrais les métiers ou les passions des autres, mais photographier des trucs … Voilà quoi. A part des gens, des évènements et des trucs comme ça je voyais mal pourquoi on pouvait s’admirer tout un temps devant une fleur par exemple. Non mais je disais ça après avoir croisé de nombreux touristes photographiant un peu tout et n’importe quoi. Genre une enseigne de McDonalds…

Une envie soudaine me pris pour revisiter ces jardins. Je n’étais plus dans la phase ou chaque souvenir d’Evelyn me faisait mal ou d’être dépressif en voyant un endroit visité ensemble. C’est clair que je ne sautais pas de joie mais bon. Revoir ces jardins pourrait peut-être me faire du bien et me donner un peu de sérénité. Du coup je demandais, tout à fait spontanément :


« Ça vous ennuie si je vous accompagne ? Ça me tenterais bine de revoir ces jardins. Enfin si vous voulez bien de moi ! »

- Peut être que certains le sont, mais je n'ai jamais eu de problème avec celui pour lequel je travaillais. C'est simplement un changement de carrière qui m'a poussé à publier maintenant sur un blog, afin de partager mes clichés.

C'était plus utile que de juste prendre des photos et après plus rien. Donc, que l'homme se rassure, il n'y avait aucun problème avec la presse. Ou du moins, Jason n'en n'avait jamais eu. Mais vu qu'il continuait toujours la photographie, qui restait l'une de ses grandes passions avec l'écriture, autant publier ses clichés sur le net ! Voyons voir, comment explique au plus simple ce que pouvait prendre en photo Jason …

- D'une façon globale, tout ce qui peut avoir de l'intérêt à mes yeux. Des endroits précis, que j'essaye de prendre d'un point de vue intéressant. Donc, ça peut être de tout. N'avez-vous jamais posé des yeux sur quelque chose en vous disant que ce que vous voyez était intéressant, ou tout simplement beau ? Comme par exemple … un coucher de soleil, ou … une femme ?

Ou un homme, chacun ses goûts. Il ne pouvait croire que jamais on ait pu vivre sans trouver quelque chose de beau ! Que ce soit un paysage, ou bien une personne. Des personnes peut être même, des situations …. Quelque chose quoi. Certes les gens aujourd'hui avaient tendance à ne pas relever leur nez de leur portable, de leurs écran et à ne plus voir l'extérieur que via des écrans, mais tout de même un minimum. Un peu surpris, il l'entendit lui demander s'il ne voyait pas d'inconvénients à l'accompagner jusque la bas. Il secoua la tête à la question de l'inconnu. Si ça lui faisait plaisir, pourquoi pas ! Ils étaient dans un pays libre de toute façon.

- Non, je vous en prie faites donc. Tant que vous ne vous amusez pas à surgir devant l'objectif, vous ne me dérangez nullement.

Plaisanta t-il un peu. On ne sait jamais quels étaient les délires des gens. Si le truc du type était le photobombing, ça n'allait pas être possible. Il ne faut pas se fier aux apparences, parce que si l'homme semblait être sérieux, calme, qui sait si dans le fond ce n'était pas un gros déconneur.

- Au fait, moi c'est Jason. Et vous ?

Ce serait plus pratique que de l'appeler machin ou truc muche. Puis pendant qu'ils se mirent en route, il lui demanda :

- Vous n'aviez rien de prévu en cette belle journée ?

C’était cool que ce gars continue sa passion. Et puis c’était rare. Je trouvais que beaucoup de gens, du moins ici à New York n’avaient plus de passions. Pour beaucoup c’était : métro-boulot-dodo. Hors il y avait plus. C’était chouette que ce type le fasse en tout cas. Mais le fait d’entendre une personne parler de ses passions me refaisait penser à la médecine. Parce que oui en plus de renouer avec d’ancien ami, ce qui était difficile, j’avais de plus en plus envie de reprendre mes études. Mais j’hésitais énormément. Enfin, je verrais bien…

Je lui demandais alors ce qu’il photographiait. J’eu un sourire triste quand il me demanda si je n’avais jamais posé mes yeux sur quelque chose que je trouvais beau. Evelyn et son magnifique sourire quand elle souriait… Oh que si ! Je hochais doucement la tête.

« J’ai eu cet effet-là oui.

Et qu’est-ce que j’aurais aimé avoir plus de photos aujourd’hui d’elle. Ironique n’est-ce pas, quand on savait que c’était moi celui qui était inconfortable devant l’objectif. Trop de choses me rappelaient Evelyn aujourd’hui du coup je décidais d’abandonner mon banc. Temps qu’à broyer du noir autant le faire dans un endroit plus joli. Je rigolais doucement ne me levant du coup quand le gars accepta ma demande.

« Ne vous inquiétez pas, être devant l’objectif est loin d’être un de mes passetemps favoris ! »

Il se présenta alors et je me rendis compte qu’en effet on ne s’était pas encore présenté l’un l’autre. Je tendis ma main du coup par reflex :

« Liam. Enchanté. »

Commençant alors à avancer doucement avec Jason je haussais les épaules à sa question. Avoir un truc à faire ? A part penser sans arrêt à ma copine morte ? Essayer pendant deux heures à écrire un message à un ancien copain perdu de vue avec qui j’aimerais bien renouer ? Non pas vraiment.
Pas que je n’ai pas envie d’écrire ce message à Zack mais j’avais peur en quelques sortes. Nous avions changé et je ne savais plus trop ou j’en étais déjà pour moi-même alors le fait d’avoir des incertitudes aussi de son côté n’aidait pas. De plus il avait été mon meilleur pote il y a neuf ans de cella… les gens changent et j’avais peur qu’on ait changé au point de ne plus nous entendre ou de ne plus rien avoir à se dire. Je trouverais ça dommage…

Enfin je répondis du coup de manière évasive à Jason. Pas que j’avais un truc contre lui mais je n’étais pas causant de nature.

« Pas vraiment. A part me casser la tête sur l’une ou l’autre chose. Et vous ? Vous travailler en plus de faire vos photos ? »

C’est vrai que c’était bien qu’il fasse sa passion mais s’il ne travaillait plus dans la photo de je me demandais bien avec quoi il gagnait sa vie. Si ça se mettait c’était un mac ou un dealeur de drogues. Enfin dans les deux cas il avait au moins un beau loisir. Il avait parlé d’un changement de carrière… Je ne voulais pas non plus être indiscret. Je n’étais pas du genre à creuser jusqu’à trouver.

Parfait si l'homme n'était pas du genre à vouloir se mettre à tout prix devant l'objectif. Ça aurait été vraiment pénible sinon. Liam donc. Jason lui adressa un bref sourire, poli, une fois les présentations de faites. Puis, tous deux se mirent en marche jusqu'au point recherché. Du coin de l'oeil, il observa Liam, visiblement pas bien inspiré par sa question. S'il ne voulait pas y répondre, c'était son droit. Après tout ils ne se connaissaient même pas. Donc, il n'avait rien de prévu pour aujourd'hui ? Ça de toute façon, il aurait pu le deviner plus aisément.

- Tout à fait. Comme dit, il y a quelques années je vivais de mes photos, mais entre temps, j'ai disons, trouvé un autre travail qui me plait tout autant que la photo, mais me permets de gagner mieux ma vie, et me laisse plus de liberté. Alors c'est tout bénef.

Puisqu'il pouvait continuer à faire ses photos librement, et à coté, écrire, se plonger sur ses romans, ses écrits. Une vie de rêve ! Et il en avait pleinement conscience ne vous leurrez pas. Il savait bien qu'il était tout de même chanceux à ce niveau, bien que derrière tout ça, il y avait énormément de travail, beaucoup d'écrits qui ne verront jamais le jour, des essais des ratés …. C'est du travail, mais quel bon travail.

- C'est pour ça que j'ai le temps d'aller visiter et prendre des photos, sans que ça ne gêne personne.

Il avait beau pondre un roman par an, Jason n'avait cependant aucun délai pour ses romans. Même si généralement il n'avait besoin que de plus ou moins dix mois pour en écrire un, si jamais soudainement il prenait plus de temps, personne ne pourrait le forcer à écrire plus. Ce qui n'avait aucun sens d'ailleurs. Ainsi donc, il gérait tout seul son emploi du temps, sa vie, et les jours ou il sortait pour photographier le monde. Marchant toujours aux cotés de Liam, il tourna un peu la tête vers lui, afin de lui demander poliment :

- Et vous du coup, que faites-vous de beau dans la vie ?

Un métier ? Une passion ? Une famille à nourrir peut être ? C'est qu'il causait de lui, mais intéressons-nous un peu à la personne qui l'accompagnait. Et sûr qu'il devait être intéressant. Jusqu'ici, Jason n'avait que rarement rencontré des gens qui n'étaient pas digne d'intérêt, pourquoi Liam en ferait-il partie ?

Je souriais poliment et hochais de la tête alors qu’il répondit à ma question. Même s’il était resté vague je comprenais un peu cette histoire. Avoir un métier et en changer. Je le comprenais en partie du à mon envie de reprendre mes études. C’est vrai que sa vie devait être plus tôt confortable si jamais il avait le temps de faire ses hobbys à côté de son boulot. Alors que nous marchions il retourna la question. Je haussais les épaules.

« Je suis mécanicien. Je travaille dans un garage à Brooklyn. Mais j’hésite à me réorienter. »

Je ne voulais pas étaler tout mon passage en prison à un inconnu, à quoi bon passer son temps à ressasser le passé. J’avais déjà eu ma dose avec Zack concernant les souvenirs douloureux en quelques sortes. Mais bon ne disait-on pas aussi d’un autre côté qu’un étranger porte conseille ?

« J’ai commencé des études de médecine il y a quelques années mais j’ai du arrêté. Ca me passionnait vraiment et j’ai peut-être la chance de me relancer aujourd’hui du coup… J’hésite mais c’est une idée qui me semble de plus intéressante. Sinon rien de vraiment passionnant…»

Femme morte mis à part. Je tournais dans la rue et nous arrives presque immédiatement devant les escaliers menant aux jardins.

« Par ici ! »

Nous montions côte à côte les marches avant de débouler sur les jardins. Comme dans mon souvenirs, beaucoup de vert, des rails, des bancs en bois. Peu de gens en cette saison non touristique même avec le soleil qu’il faisait. Je restais un moment sur place sans bouger, admirant le paysage. Je me tournais alors vers Jason.

« Je crois que je vais m’installer sur un banc un peu plus loin, si jamais vous voulez vous joindre à moi hésitez pas ! »

Je lui fis un sourire. Je n’avais pas vraiment l’envie de marcher, contempler m’irais parfaitement. Si jamais il voulait se joindre à moi il était la bienvenue.

Jason eu un petit signe de tête lorsque Liam lui révéla être mécanicien. Et ce à Brooklyn. Encore un quartier dans lequel il n'avait pas mis les pieds tiens. De toute façon, la ville, immense, lui prendra tellement de temps à être parcourue ! Il allait lui demander en quoi il pensait se réorienter, lorsque Liam le devança, en lui parlant de ses études de médecines. Effectivement, entre la mécanique et la médecine, il y avait un monde ! Il se demanda aussi pourquoi il avait dû arrêter, mais ne posa pas la question à voix haute. Ça ne le regardait pas. Peut être une question d'argent vu que c'est très cher les universités aux Etats Unis, de temps ou autre chose. C'est donc la dedans qu'il pensait à se convertir. Ou retourner, c'est selon. Un air surpris passa sur son visage à la conclusion de Liam, sur le fait qu'il n'ait rien de passionnant à raconter d'autre.

- Vous plaisantez ? Tout est passionnant voyons.

Et c'était sincère. Pourquoi les gens pensaient ils toujours que, parce qu'ils n'ont pas désamorcé une bombe au petit déjeuner, couché avec un top model à la pause café, dîné avec le président à midi, ils s'imaginaient de suite avoir une vie plate ? Même ce mécanicien, en apparence normal qu'était Liam, devait bien avoir plein de choses palpitantes dans sa vie. La encore, Jason ne demandait en rien à ce qu'il lui dévoile tout. Ils étaient des inconnus qui bavardaient, rien de plus. De toute façon, ils étaient arrivés. En bas des escaliers, Jason releva les yeux pour voir un peu ce qui l'attendait, avant de suivre Liam, et marcher à ses cotés pour rapidement monter les marches et arriver aux jardins. Jason ne fit aucun effort pour cacher le sourire ravi que cette découverte lui procura. Pourquoi donc ? Ce qu'il voyait était vraiment beau, nouveau, et vraiment original ! Il ne disait pas qu'il n'avait jamais rien vu de plus fou, ça non, mais à chaque lieu sa beauté et sa singularité. C'était super. Et ça allait lui faire de superbes photos. Il se tourna un peu vers Liam lorsqu'il lui parla, et approuva d'un signe de tête ses dires, le tout avec un sourire sur la fin.

- Je vous en prie, faites donc, vous m'avez déjà beaucoup aidé en me guidant jusqu'ici.

Il demandait une simple indication et au final, il avait trouvé un guide. Si c'était pas beau ça.

- Merci encore Liam, je vais prendre quelques photos pour commencer, et puis on verra bien.

Conclut-il avec un autre sourire poli. Il allait faire des photos des alentours, marcher peut être un peu, et à voir si ensuite il allait rejoindre Liam sur son banc. Si tant est qu'il y est toujours. Laissant Liam à ses occupations, Jason se mit alors à explorer un peu les lieux de son coté. En un premier temps avec ses yeux avant de sortir son appareil. Jeter un coup d'oeil au plan aussi du coin qui indiquait à quel point les jardins s'étendaient. Et dès qu'il trouva un premier élément intéressant, sorti et alluma son appareil photo afin de débuter sa petite séance. Il prenait quelques clichés d'une chose ou d'une autre, d'un point de vue différent s'il le pouvait. Capturant également la ville autour de lui, de cette verdure, des détails ou des ensembles. Tant de choses intéressantes ! Puis, alors qu'il observait les lieux, une autre personne retint son attention. Ah tiens, son guide de tout à l'heure, resté sur le banc. L'air pensif. Pour lui avoir un peu parlé et du peu qu'il le connaissait, il dirait que Liam était quelqu'un de tout à fait sympathique. Mais à le voir ainsi assis, perdu dans ses pensées, il y avait un il ne savait quoi de mélancolique. Les lieux étaient beaux, le temps aussi, les environs prompts à la détente. Malgré tout, Liam faisait comme détaché dans ce décor. Et, justement, c'est ça qu'il trouva intéressant. Le fait qu'il était beau garçon était un bonus. Alors, profitant qu'il ne l'ait pas calculé, Jason releva son appareil photo, et prit quelques cliché de Liam. Variant les angles de prise de vue, en se mettant un peu à genoux ou en se penchant, se déplaçant, il réalisa une petite série de clichés de son guide de fortune. Il fera de toute façon le tri en rentrant, mais ainsi, il était sûr d'en avoir au moins une d'exploitable. Mais, rassurez-vous, Jay ne prenait jamais qui que ce soit en photo sans demander, avant ou après si ça dérangeait la personne. Le droit à l'image et tout ça... Alors ses photos de prises, il rabaissa son appareil et marcha d'un pas tranquille vers Liam. Un sourire avenant sur le visage lorsqu'il remonta à sa hauteur, et qu'il le calcula.

- Je me permets de vous rejoindre un petit instant.

Sûr que ça ne dérangeait pas Liam, il prit place à coté de lui sur le banc, avec un petit soupir une fois assis.

- C'est vraiment un endroit très charmant ! Ce contraste brut entre la ville et la nature est remarquable. Ça va me faire de superbes photos tout ça.

Lança t-il sur un ton nettement enjoué. Mais ce n'était pas tant pour cela que Jason était revenu auprès de Liam. Rallumant son appareil photo éteint tout à l'heure, il fit défiler les quelques photos de prises pour arriver à celles du mécanicien. A ce moment, il releva les yeux vers lui, en lui présentant l'appareil. Il ne lui tendait pas, ne laissant personne y toucher, juste qu'il puisse regarder.

- Je me suis permis tout à l'heure, j'ai trouvé en votre posture et l'expression de votre visage quelque chose de très intéressant. Mais dites-moi si vous me permettez de les conserver, et peut être les publier sur mon blog photo, si vous refusez, ce que je comprendrais très bien, je les supprime de suite.

Et sans rechigner.

J’avais haussé les épaules, « tout est passionnant »… Ca dépendait toujours pour qui. Et la manière dont ça passionnait. Curiosité malsaine, ragots, étiquette, compassion. Je me demandais sur quel type d’intérêt je serais tombé si j’avais parlé de la prison à Jason. Pas qu’il semblait être méchant ou quoi, mais j’aimais bien voir le visage des gens changer. Enfin « j’aimais bien » ; façon de parler. Ce n’était jamais un moment super agréable mais le fait de savoir que je faisais réagir des gens ça me faisait rire parfois.

Je montais finalement les fameuses marches menant au jardin et me tournais vers Jason pour voir son expression. Il semblait ravi d’être ici. J’eu un petit sourire amusé, j’avais fait un heureux et une bonne action pour le reste de ma vie, je pouvais rester dans ma tanière dorénavant. Je m’excusais au final auprès de lui, proposant quand même de venir s’asseoir si jamais. Je hochais la tête et souriais à ses réponses avant de m’en aller. On aurait presque dit que j’étais social aujourd’hui ! Plus sérieusement je le laissais vaquer à son travail et finit par m’asseoir pour sortir mon téléphone de ma poche. Allé, ce n’est qu’un message ça ne mord pas !

Je commence par quoi moi ? « Salut, c’est ton meilleure pote oublié en prison, je t’écris pour aller boire un verre ? ». Vau mieux pas peut-être. Le pire est que je ne me serais peut-être jamais cassé autant la tête si je n’avais pas eu cette histoire avec Kyle et ses texto ‘déplacé’ après la mort d’Evi. J’en rirais certainement plus tard. ‘T’es mort ?’ – ‘nan, mais ma copine oui !’. Celui-là restera mon favori quand même ! Enfin, je me reconcentrais sur mon travail. « Salut, c’est Liam », voilà ça c’était déjà un début correcte. Si jamais il a envie d’envoyer balader son téléphone plus loin à ce moment-là, il n’aura pas besoin de lire la suite pour savoir qui je suis et pourquoi c’est ! « Salut, c’est Liam. Ça te dit toujours d’aller boire un verre ? ». Clair, net, précis, envoyé !

Je me laissais aller contre le dossier du banc, fermant les yeux quelques secondes savourant les rayons du soleil qui transperçaient les nuages. Et si jamais il ne voulait pas ? J’avais bien ressentit le malaise quand je l’avais rencontré. Non je n’étais pas un tueur en série, il pouvait se détendre. Même si j’avais joué un peu là-dessus aux vues de ses réactions. J’espérais juste qu’il était sincère en proposant de renouer ou du moins de mettre tout à plat et de discuter de ce qui c’était passé depuis. J’eu une petite pensée mélancolique pour Monica. Elle était sympa et chouette comme fille. J’avais quelques bons souvenirs avec elle, même si j’étais plus proche de Zack. Dans ma tête l’un n’allait pas sans l’autre. J’avais rouvert mes yeux, mon regard perdu dans le vide à penser à tout ça. Parfois j’avais l’impression d’être vieux et que ma vie était finie. Pas que j’étais suicidaire, mais j’avais l’impression que plus rien ne m’attendais, d’être pensionné en quelques sortes. Enfin bon parfois j’allais aussi un peu trop loin dans mes réflexions !

Je relevais la tête quand j’entendis une personne me parler. Le photographe était revenu. Je répondis à son sourire par un sourire plus petit je dois bien l’avouer, mais je souriais c’était déjà ça !

« Heureux que vous ayez trouvé votre bonheur ! C’est vrai que ça contraste avec la ville ! On à limite l’impression de ne pas être à New-York. »

J’avais rajouté la dernière partie avec un petit rire. Pas de foule monstre, pas de bruits monstres. Enfin on entendait la circulation passer en dessous du pont, mais ici même c’était calme et paisible ! Les gens prenaient leurs temps. Je me penchais légèrement en avant qu’il il me présenta son appareil, pensant qu’il voulait me montrer un de ses cliché. C’était bien une photo, mais j’étais le centre de l’image. Je le regardais étonné alors qu’il reprit la parole.

« Ah… Heu… Non non, vous pouvez la garder ! Enfin les garder si vous en avez fait plusieurs ! »

J’étais étonné. Il m’avait photographié moi alors qu’il avait tout le parc à sa disposition. Je me penchais un peu plus en avant, ne touchant cependant jamais à l’appareil. Je ne sais pas pourquoi mais on sentait qu’il ne voulait pas que je le prenne et je comprenais parfaitement. L’appareil ne semblait pas être fait pour un amateur ! Je fronçais les sourcils en me regardant de plus près.

« J’ai l’air si perdu que ça en vrai ?! »

Question ironique. C’est vrai que mon image était l’expression même de « perdus dans ses pensées ». Le regard vide, fixé sur un point imaginaire, une expression neutre. En plus je faisais partie de ses gens qui lorsqu’ils ont une expression neutre, semblent tirer la tête, ou passer un mauvais jour. Je me redressais finalement et hochais la tête.

« Non personnellement ça ne me dérange pas si vous la garder. Vous n’exposer pas dans des galeries c’est ça ? »

Là ça ferait quand même bizarre… Mais sinon, non qu’il la garde. Je n’étais pas maniaque de mon image ni ‘je m’en foutiste’ mais je ne voyais pas pourquoi il ne pourrait pas la garder. Ce n’est pas comme si les gens allaient me pointer du doigt en mode « he regarde, le type de la photo dans les jardins ! ».

Pour la peine, Jason était aussi heureux d'avoir trouvé son bonheur tiens. Et Liam soulignait un fait totalement juste : on ne se croirait presque pas à New York. Bien sûr, il y avait les bruits de la ville en arrière fond, on voyait les buildings autour, mais ici même … c'était en décalage. Comme une petite bulle en dehors des lieux. Avec moins de personnes, ce serait encore mieux. Mais bon. C'était New York après tout, il ne fallait pas s'attendre à trouver des coins plus désertés. Et ce qui était encore plus en décalage c'était Liam. Du moins le Liam présent sur les photos qu'avait pris Jason un peu plus tôt, et ou l'homme se découvrait sur l'une d'entre elles. Cela ne l'étonna pas de voir la surprise dans le regard de l'homme à coté de lui. Généralement ça surprends de se faire prendre en photo de la sorte lorsqu'on est pas une célébrité. Qu'il lui dise pouvoir la garder, les garder, lui fit grandement plaisir.

- Merci beaucoup, c'est très gentil à vous. Et oui, les garder, j'en ai pris quelques une pour être sûr d'en avoir au minimum une correcte dans le lot.

Pour illustrer ses propos, il fit défiler les quelques photos sur lesquelles Liam était présent. La pose de ce dernier ne changeait pas vraiment, c'était surtout les angles de prise de vue, la lumière aussi. A lui de choisir laquelle était la plus parlante. Bien qu'il laissait Liam regarder à sa guise les photos ce n'était pas pour autant qu'il le lui laissait entre ses mains. Hey ça va hein ! Il avait beau avoir été très aimable avec lui tout à l'heure, mais il ne le connaissait quand même pas. Et de ce fait ne voulait pas prendre le risque de peut être laisser son appareil à un type qui pourrait peut être partir avec. Certes, Jason courait vite, mais il suffisait que Liam frappe plus fort et c'était foutu. Au cas ou vous vous demandez, oui, le petit a une très bonne imagination, très fertile. Il regarda Liam se pencher un peu pour mieux se voir sur l'écran, assez petit de l'appareil, le tout avec une bonne question tiens. Enfin, façon de parler.

- C'est assez flagrant ne trouvez-vous pas ?

Lui répondit-il, sans méchanceté. Avec peut être un peu de compassion néanmoins, un petit sourire sur ses lèvres. Mais il ne se moquait pas. Encore une fois il était content d'avoir son approbation pour garder sa photo. Et qu'il soit rassuré il n'exposait pas en galeries, juste sur son blog. Allez savoir si ça allait vraiment le rassurer tiens.

- Non, uniquement sur mon blog.

Comme il le lui avait dit plus tôt. Il n'exposait pas dans les galeries. Il ne savait pas trop si ses photos étaient dignes d'être exposées ainsi, traitées comme des œuvres d'art. Lui, prenait simplement des photos pour le plaisir, sans y chercher un sens de fou, sans pousser le vice très loin. S'il le voulait, il le pourrait. Mais non. Il préférait faire ça comme ça, pour le simple plaisir de la photo, et les partager à qui voulait.

- C'est pour ça que si vous souhaitez que je les supprime il n'y a aucun problème. Vous voulez peut être que je vous donne le nom de mon blog pour pouvoir retrouver cette photo de vous, et éventuellement râler pour que je l'efface ?

S'il parlait au singulier, c'est parce qu'il comptait n'en mettre qu'une. Il ne faut pas mettre trente six fois la même photo ça ennuie les gens.

Je regardais l’écran défiler. Je ne touchais pas son appareil, sentant qu’il serait mal à l’aise vis-à-vis de ça. J’étais vraiment étonné. Il en avait pris plusieurs et elles étaient vraiment … bien. Sincèrement. Je n’étais pas du genre narcissique ou autre mais d’un point de vue objectif ces images étaient bien prises. D’un point de vue subjectif je me voyais mélancolique et perdu dans mes pensées. J’avais limite pitié de moi-même. J’étais assez tourmenté récemment et ces images reprenaient bien mes émotions. Ca me faisait un peu comme une douche froide. Il fallait que je me bouge. A me voir comme ça sur l’image j’avais envie de me donner une claque et de me secouer. Il fallait me ressaisir.

J’avais l’impression aussi de faire ma bonne action de la journée à lui donner mon accord. Ca me faisait plaisir. Ma question était rhétorique, je n’attendais pas de réponse mais je relevais les yeux vers lui quand il répondit. J’eu un léger rire. Oui évident était le bon mot.

« Ouai ! Désolé. Parfois je me rends pas compte de ce que les gens voies sur mon visage, tellement je suis perdus dans mes pensées ! »

Je fis un sourire un peu désolé. Mais c’était vrai. J’étais tellement dans ma bulle que je ne me rendais pas compte que mes émotions se lisaient aussi clairement sur mon visage. C’était ça qui m’avait choqué aussi. Le fait qu’on le voit autant. Mais c’était aussi ce qui m’avait décidé pour me bouger un peu. Je ne pouvais pas rester ainsi ! Enfin je n’avais pas l’air trop pathétique sinon Jason ne s’amuserait certainement pas à me sourire. Je demandais ensuite où il exposerait. Je haussais un sourcil quand il parla de son blog. Je ne relevais pas cependant, il m’avait dit ne pas exposer et ne plus vendre dans un magazine. Je me redressais légèrement, arrêtant de regarder l’écran de son appareil, et hochais la tête en souriant quand il me proposa l’adresse de son blog.

« Oui avec plaisir ! »

Je verrais ses autres clichés du coup. Evelyn se serait certainement extasié devant les photos ! Je me demandais ce que j’allais y trouvé comme clichés. Mais du coup j’étais curieux.

« Vous faites de la phot depuis longtemps ? »

Je devenais vraiment social là !

- Ne vous en faites pas, vous n'avez aucun compte à me rendre.

Le rassura un peu Jason avec un sourire aimable. Il était perdu dans ses pensées s'il le voulait, c'était son droit. Lui, il n'était qu'un simple passant, amoureux de la photographie qui avait saisi cet instant précis ou l'homme était réellement perdu dans ses pensées, loin du monde qui l'entourait. Pour les photos prises, c'était très intéressant. Pour Liam, ça l'était peut être moins. Il ne se permit pas de lui demander quelle était l'origine de sa mélancolie. Ça ne le regardait pas et ce serait vraiment malvenu. Ils restaient deux inconnus l'un par rapport à l'autre. Mais il n'empêcha pas que ça l'intriguait quand même cette histoire. Si ça se trouve il n'y avait pas d'histoire de folie, mais que voulez-vous quand on est curieux, tout porte à intérêt. Il adressa un sourire plus franc à Liam quand il accepta de prendre le nom, adresse de son blog. Jason ne faisait pas ça pour de la pub. Sans être the place to be niveau photographies sur le net, son blog se portait très bien niveau visite. Dû d'une part à sa notoriété en tant qu'écrivain, et de l'autre pour ses photos uniquement. La sangle de son appareil passée autour de son cou, il laissa celui-ci sur ses genoux pour aller chercher de quoi noter dans ses poches. Heureusement, vu qu'il avait souvent des idées qui lui venaient sans prévenir, il avait toujours de quoi faire. Il nota l'adresse et le nom sur une petite feuille qu'il tendit à Liam.

- Tenez, et si vous voulez que je vous envoie vos photos n'hésitez pas non plus à me le faire savoir. Normalement, je les mettrais en ligne encore ce mois-ci.

Il avait encore quelques autres photos à trier et à traiter avant de s'attaquer à celles-ci. Peut être qu'il arrivera même à les publier cette semaine-ci, si jamais la motivation ultime prenait part de lui. Ou plus tard s'il avait autre chose à faire entre temps. Hum, question intéressante que posa alors Liam !

- Très longtemps oui ! J'ai commencé quand j'étais gosse, mais bon.... on est d'accord, les premiers dessins, les premières photos des gamins, c'est jamais bien fameux on ne va pas se mentir.

Il regarda Liam l'air de dire : on est d'accord hein ? Vraiment, les gosses ça dessine, certes, mais c'est moche faut dire ce qui est. De même, ses photos, c'était des photos, mais ça ne méritait pas qu'on s'y attarde.

- Mais du moment ou j'ai commencé je n'ai jamais arrêté, et me suis, j'espère bien, amélioré. Cette passion m'a ainsi accompagnée jusqu'ici et j'ai ensuite décidé d'en faire mon métier. Si aujourd'hui je ne suis plus photographe professionnel, ça ne m'empêche pas de poursuivre ma passion.

Comme à l'époque, ou il se destinait à la photo, il continuait toujours d'écrire. Puis avait été publié. Maintenant c'était l'inverse qui s'était produit. Il avait cessé d'être photographe pro, mais poursuivait toujours pour son plaisir. Ça lui ferait trop mal d'arrêter. Et puis le métier d'écrivain permettait beaucoup de temps libre, qu'on se le dise.

- Et vous, j'imagine que ce n'est pas vagabonder dans les parcs votre passion, non ?

Lui demanda t-il d'un ton léger. Après sait on jamais !

Jason me tendis un papier avec l’adresse de son blog que je rangeais dans ma poche. J’irais certainement jeter un coup d’œil un de ces jours. Je hochais la tête et souriais. Je n’étais pas fan d’autoportraits mais là cette photo m’ouvrait les yeux. Je la garderais peut-être symboliquement histoire de me rappeler ce qui m’avait donné un coup de pied aux fesses. Je demandais par curiosité comment il en était arrivé à la photographie. Je rigolais doucement, en effet les premiers essais n’étaient jamais brillants.

« C’est cool que vous n’ayez pas lâché ! »

Je bloquais légèrement quand il parla de passion. J’aimais lire oui. Allez au cinéma aussi. Ecouter de la musique. Mais une passion ? Non. Il n’en avait jamais eu.

« J’aime certaines activités mais je n’ai pas réellement de passions. »

C’était en partie pour ça qu’Evelyn lui avait fait visiter plusieurs trucs : ouvrir son esprit à d’autres choses, lui montrer ce que le monde offrait comme possibilités.

« Je suis fasciné par la médecine mais plus dans le sens ou ça m’intéresse de savoir comment on peut guérir les gens. Mais ce n’est pas une passion semblable à votre photographie. Je pense que je n’en ai jamais vraiment eu… »

J’essayais de me souvenirs. J’aimais parler aux gens venant au diner de mes parents. J’aimais lire mes livres, joué avec mes amis. Je regardais des films, des séries. Je suivais mes cours. Evangeline. Mais aucune activité récurant qui ne ressortait. Pas de sports favori, pas d’occupation favorite. Même le fait de lire : j’aimais bien mais je n’en étais pas fan absolu ! Pas non plus de jeu vidéo. En fait j’étais un peu monsieur tout le monde dans le fait que j’essayais mais sans avoir une activité qui me plaisais plus que toute autre. Je souriais légèrement ironique :

« Je vous avais bien dis, rien de bien passionnant ! Fin ça peut paraître un peu triste mais non je n'ai jamais vraiment eu "une" passion. »

Vive la non-vie! Enfin ça ça n'avait rien à voir avec la prison au moins! Enfin je trouvais ça dommage; j'aimais bien les gens passionnés mais moi-même je n'avait pas de passions. j'aurais bien aimé pourtant. Je trouverais peut-être un jour!

C'est surtout que Jason ne se voyait pas lâcher sa passion pour la photo. Comme ça lui aurait paru improbable qu'il lâche celle pour l'écriture. Vivre sans l'un ou l'autre ne lui était pas possible, il avait besoin des deux. Dans la liste de ses passions il y avait aussi la musique, mais elle semblait bien ridicule à coté de l'amour qu'il vouait au reste. Il eu un air un peu plus intrigué quand Liam lui dit ne pas avoir de passion à proprement parler. Il ne dit rien, laissant Liam lui expliquer qu'il aimait en revanche la médecine, mais rien qui puisse être considéré comme une vraie passion.

- Oh … je vois … en résumé, la médecine se rapporterait plus à une vocation qu'une passion.

Les deux étaient dissociable oui. Par exemple quelqu'un pouvait être passionné de papillons, mais dont la vocation était de soigner les gens. Pour l'exemple on parle. Et Liam, lui, semblait ne pas avoir de passion à proprement parler. Ce à quoi, Jason resta pensif un petit instant, la bouche légèrement plissée. Finalement il haussa les épaules en le regardant.

- Ce n'est pas bien grave, ça arrive à tout le monde de ne pas avoir une passion. A choisir, autant ne pas en avoir qu'une passion glauque et étrange …

Vous imaginez si Liam avait eu comme passion dans la vie de collectionner les collants des grands mères ? Allez placer ça dans une conversation !

- En tout cas faut pas vous en faire, libre à vous de ne pas avoir une passion dans votre vie. Peut être dans le futur vous en découvrirez une, peut être pas. Dans tous les cas, ça vous regarde.

Et qu'il ne laisse personne ne le juger pour ça. Ce n'était pas forcément triste de rien avoir, même si, étrangement, à y repenser ça ne surprenait pas trop Jason. Ça allait avec le personnage, cet air mélancolique, décalé du monde … Peut être était il juste dans une mauvaise passe. Ou était ce plus qu'une passe. Ça ne le regardait pas.

- Bien. J'ai assez abusé de votre temps, et j'ai toute une allée à photographier !

A ces mots, Jason s'était relevé dans un geste plein d'entrain, la voix joyeuse. Il s'était retourné vers Liam, lui adressant un dernier sourire aimable :

- Prenez bien soin de vous, et à une prochaine peut être.

Qui sait. Déja s'il se rendait bien sur son site de photo, peut être lui enverra t-il un message quelconque. Que ce soit pour lui demander s'il en avait d'autres que celle publiée, ou quoi que ce soit. Tout ce que Jason espérait, c'est que quoi que ce soit qui est à l'origine de sa tristesse évidente, c'est que ça puisse s'arranger. Ce serait bien. Après s'être salués, Jason s'en alla de son coté, pour continuer à prendre des clichés de ce jardin hors du commun. Mais aucune autre rencontre ne fut à la hauteur de celle-ci, si singulière.