Le livre contre un chocolat chaud [Riley]

Après son dernier cour de la journée en ce début du mois de janvier, Naëlle emprunta la voiture de Suzan pour se rendre au campus. La veille, elle avait convenu avec son chéri de passer le voir pour lui rendre le bouquin qu’il avait oublié chez elle et dont il allait avoir besoin sous peu, mais également pour passer un peu de temps en sa compagnie. Disons que les vacances de Noel ne s’étaient pas réellement déroulées comme prévue pour les deux amoureux. Entre la venue de la meilleure amie et de la mère du jeune homme pour les fêtes et leur engueulade, ils avaient manqué un peu de temps à deux.

Naëlle avait pris avec elle des dossiers à remplir de plusieurs universités. Ainsi que les demandes de bourses parce qu’elle n’avait pas vraiment les moyens pour entrer dans certaines d’elle. Comme ça, elle aurait de quoi en attendant qu’il soit fini de faire un devoir écrit avant d’aller diner ou se faire un ciné.

Une fois garée, la jeune femme attrapa son sac à dos et prit la direction du dortoir de Connor. Elle monta au bon étage, se dirigea vers la porte et toqua pour annoncer sa présence. Et elle attendit patiemment qu’on vienne lui ouvrir. Elle frappa au moins cinq fois mais toujours pas de réponse. Pas de Connor, ni de Riley. Peut-être que les deux jeunes hommes étaient encore en cours ou à la bibliothèque, à moins que ça ne soit les courses pour avoir de quoi manger. Si elle avait su, elle aurait apporté des pâtisseries pour leur petit déjeuner. Elle s’adossa au mur pour patienter mais un type s’approcha d’elle en lui parlant :

- Ici, c’est le dortoir des garçons ! Il lui indiqua la direction opposée, à savoir celle de la sortie. Tu n’as rien à faire ici, si tu attends quelqu’un tu le fais à l’extérieur ! Bonne soirée !

Mais c’était qui ce gars ? Il se foutait de sa gueule là, non ? Ce n’était pas la première fois qu’elle venait rendre visite à Connor et on ne l’avait jamais virée de la résidence. Même qu’elle avait fait le pied de grue en attendant l’arrivée d’un des deux garçons. Sans oublier qu’il ne faisait pas très chaud dehors. L’homme avait oublié qu’on était en hiver ou quoi ? Si elle choppait une pneumonie, elle pourrait plainte contre lui.

Elle s’installa donc sur un banc après avoir bien refermée son blouson, resserrée son écharpe et mis son bonnet en le faisant bien descendre sur son front et ses oreilles. Ensuite, elle sortit un dossier universitaire qu’elle commença à remplir avant de finir par s’intéresser à la dernière partie. On lui demandait de faire une dissertation sur elle. Elle attrapa un cahier et commença à écrire, autant commencer par ça si on le lui demandait sur chacun des dossiers, elle n’aurait plus qu’à mettre au propre.

« Je m’appelle donc Naëlle Iris Sullivan, j’ai eu 18 ans récemment et honnêtement que je ne sais pas quoi vous dire, sur moi et ma vie. Ça ne fait que seulement un an que je sais réellement que je veux travailler avec les enfants, être là pour eux quand ils ont le plus besoin d’aide. Peut-être est-ce dut à mon vécu et que malgré le fait que j’ai été entouré je me suis sentie plus seule que jamais, abandonnée. Je n’ai pas peur de mourir parce que ça fait partie de la vie : on nait, on vit et on meurt. Non, ma plus grosse peur c’est d’être abandonnée. Je n’ai que 18 ans et j’ai déjà beaucoup trop perdu de gens auxquels je tenais : mon père, ma mère, ma sœur et mon frère. »

Voilà ce qu’elle avait commencé à écrire. La jeune femme savait qu’il faudrait reprendre depuis le début, vu qu’elle n’avait noté que ce qui lui était venu à l’esprit. Elle avait conscience que d’autres personnes avaient perdue beaucoup plus qu’elle, mais elle ne faisait que son qu’on lui avait demandé.

Elle se frotta les mains avant de souffler dessus pour les réchauffer. Naëlle allait finir congeler à rester assise sur ce banc à attendre. Donc, elle estima que le plus sage était de ranger son cahier et son stylo, afin de mettre ses gants. Puis elle commença à faire quelques pas, espérant que l’un des garçons serait bientôt là.

Après avoir passé les fêtes auprès de ma famille, j’entamais de nouveau la vie quotidienne de l’Université. Ce n’était pas pour me déplaire mais il le fallait bien. Pour la journée, c’était une journée ordinaire de quelques cours, puis je la poursuivis en étudiant à la bibliothèque. Je ne savais pas combien de temps j’étais resté mais j’estimais que j’avais sacrément bien avancé que je pouvais me permettre d’en arrêter pour ma soirée.
Ce soir, j’avais prévu de sortir avec ma jumelle, Harley. Rien de bien branché, ça serait un petit diner, puis sans doute un cinéma par la suite. C’était juste histoire de passer du temps ensemble. Comme je n’étais pas encore dans le monde du travail, contrairement à elle, j’étais moins souple au niveau de mon emploi du temps mais rien ne nous pouvait nous empêcher de nous voir. Notre relation était très fusionnelle, c’était un besoin vital pour moi de la voir régulièrement et c’était réciproque. Le lien entre deux jumeaux était inexplicable.
Les cours sous le bras, je pris la direction du campus pour ma chambre universitaire. Je connaissais le chemin par cœur après l’avoir fait un millier de voir en l’espace de cinq mois. Dans le couloir, j’arrivais enfin devant ma chambre. Je ne fis pas attention à la fille qui attendait sur un banc. J’étais dans ma bulle à penser tout ce que je devais faire : déposer mes cours, prendre ma douche et même avoir le temps d’appeler Jordan l’espace d’un instant. En rentrant dans ma chambre, je m’attendais à tomber sur Connor mais il n’était pas là. Il était sûrement parti faire je ne savais quoi ! Lui et moi étions colocataires mais en réalité, chacun faisait sa vie comme il l’entendait. La seule chose qui nous liait était le fait qu’on partageait une piaule. Je déposais mes cours sur mon bureau, puis j’enlevais ma veste, mon pull ainsi que mon tee-shirt pour me retrouver torse nu. Je voulais profiter de l’occasion pour sauter dans la douche. J’avais sûrement oublié de fermer la porte derrière pour que j’entendis celle-ci s’ouvrir. Connor, sans doute. Je me retournais pour voir que ce n’était absolument pas le cas mais une fille. Je me retrouvais donc torse nu, les mains sur ma ceinture et une fille, autre que ma copine, rentrait à ce moment-là.

- Salut ! fis-je en remettant correctement ma ceinture. Si tu cherches Connor, il n’est pas là.

Je me doutais que ce n'était pas pour moi qu'elle venait. Je savais qui elle était mais on ne connaissait pas tant que ça. Pas plus que ça. Un des supers souvenirs qui me revenait à l'esprit était de la trouver, elle et Connor, dans une situation cocasse dans la chambre, mais ce n'était pas moi qui allais m'arrêter à ça. C'était tout de même assez amusant.

La jeune femme faisait donc les cent pas pour se réchauffer, elle regrettait de ne pas avoir fait un saut chez elle pour se changer avant de venir. L’uniforme de St James n’était pas bien chaud pour des températures aussi basses. Enfin pour rester autant de temps dehors, il était tout à fait potable pour les trajets maison-lycée. D’habitude la jeune femme prenait de quoi se changer quand elle devait rejoindre Connor mais pas aujourd’hui, tout ça parce qu’elle s’était réveillée en retard donc elle avait eu juste le temps de faire le strict minimum avant de partir.

Au bout d’un moment, Naé chercha son téléphone portable pour voir si son amoureux lui avait envoyé un message. Mais impossible de mettre la main dessus, elle avait dû l’oublier soit chez elle soit dans la voiture de Suzan. Cela dit, elle n’alla pas vérifier de peur de manquer l’un des deux occupants de la chambre où elle se rendait.

N’y pouvant plus, la lycéenne décida d’aller retenter sa chance. Après tout, il aurait très bien pu passer par un autre chemin pour revenir à sa résidence. Une fois un bon étage, Naé s’assura que le type de toute à l’heure n’était pas dans les parages. Il lui avait un peu foutu la trouille avec son air de gorille ou d’homme des cavernes. Avec sa barbe mal taillée et ses fringues trop juste pour sa carrure. Rassurée de voir le couloir désert – enfin presque – Naé se faufila jusqu’à la porte de la chambre de son chéri. Elle toqua avant de tourner la poignée, histoire de voir si elle était verrouillée ou non cette fois. A sa surprise la porte s’ouvrit…

Elle resta quelques secondes sur le palier à se demander si elle devait entrer ou non. Elle opta pour la première solution afin d’éviter le gorille qui l’aurait sans doute foutu dehors une nouvelle fois.

Quand elle fut dans la chambre, elle se trouva face à un jeune homme torse nu. Et ce n’était pas le sien. Ses joues virèrent rouge pivoine, sa mâchoire manqua de se décrocher. Pour le coup, elle ne savait pas quoi faire et n’eut pas la présence d’esprit de se retourner pour qu’il puisse passer un t-shirt. Heureusement qu’elle eut la présence d’esprit de refermer la bouche à un moment donné. Cela était arrivé quand un souvenir avait refait surface : comme le fait qu’il les ait surpris ici-même il y a quelques mois.

- Connor… Dit-elle dans un premier temps trop interloquée pour comprendre ce qu’il lui avait dit. Ah, mon Connor… J’y étais pas… Je devais le retrouver ici pour lui rendre un bouquin. Dis, est-ce que ça te dérange que je l’attende ici ? Dehors il fait trop froid et je risque de me faire virer une nouvelle fois si j’attends dans le couloir par l’espèce de gorille qui porte des vêtements trop étriqués pour lui.

Elle lui demandait la permission de rester avant de pouvoir retirer son manteau et autres habits de saison. Comme ça, elle n’aurait pas froid quand elle repartirait tout à l’heure. Elle n’avait pas précisé qu’ils devaient passer un peu de temps ensemble. C’était évident, autrement elle n’aurait pas fait le trajet jusqu’ici. Ceci dit, pour lui montrer qu’elle ne racontait pas de crack elle sortit ledit livre dans son sac à dos.

- Est-ce que tu pourrais passer un t-shirt, s’il te plait ?

Déjà parce que de le voir ainsi ça la mettait mal à l’aise parce qu’il n’était pas Connor et aussi par rapport à Jordan. D’autre part, parce que ça lui donnait encore plus froid de le voir ainsi dévêtu.

Naëlle demanda au colocataire de son amoureux si elle pouvait attendre son retour ici. Et oui, encore cette peur de déranger et de gêner. Pour elle, Riley avait d’autres chats à fouetter que de lui tenir compagnie. Bien qu’il la rassura sur ce point, elle ne se détendit pas pour autant parce qu’elle avait l’impression de faire quelque chose de mal mais elle ne saurait pas l’expliquer. La métisse avait aussi demandé la permission parce qu’elle avait la rencontre d’un gorille qui lui dit d’attendre dehors que les locataires de la chambre reviennent et lui permettent de rester.

- Tu n’as même pas idée ! Répondit-elle à sa taquinerie. C’était peut être quelqu’un qui m’a fait une blague en se faisant passer par le surveillant de l’étage.

Après tout, c’était peut-être qu’une blague de mauvais gout. Néanmoins, ce gus avait réussi à la faire sortir de la résidence et à poireauter à l’extérieur. Et comme elle n’avait pas voulu attirer l’attention et se voir interdire l’accès à l’immeuble et par la même occasion aux bras de Connor, elle avait fait ce qu’on lui avait demandé.

La lycéenne n’avait pas oublié la tenue de Riley, elle avait du mal à le regarder quand elle discutait avec lui. Après tout, elle n’avait jamais été du genre à loucher sur les mecs des copines tout comme elle aurait un comportement exemplaire. Naé avait une règle : ne pas toucher aux petits amis de ses copines. Elle savait que d’autres filles n’auraient pas autant de scrupules et se moquaient bien des autres filles du moment qu’elles obtenaient ce qu’elles voulaient. Ce pourquoi, elle lui demanda s’il pouvait remettre son t-shirt.

- Merci, dit-elle simplement.

La jeune femme n’ajouta rien sur le fait qu’il s’absente quelques instants, lui donnant la permission de faire comme si elle était chez elle. Naé en profita donc pour retirer manteau, gants, écharpe et bonnet avant d’aller se faire un chocolat chaud. Elle buvait du café mais pas autant que le thé et là, ça n’était pas la boisson qui lui faisait envie.

La tasse dans ses mains, la jeune femme fit quelques pas dans la pièce. Sincèrement, elle ne savait pas comment se conduire envers Riley. Elle avait peur qu’on imagine tout un tas de choses sur eux, tout simplement parce qu’elle s’était retrouvée toute seule avec lui. Non, elle ne se faisait pas de film du tout. Enfin bref, il ne fallait pas qu’elle fasse confiance à son imagination débordante, parce qu’il ne faisait que lui créer des ennuis. Non, elle se dirigea vers la bibliothèque et se mit à lire les titres des bouquins rangés.

- Oui, j’aime ça ! Répondit-elle en se retournant vers lui.

Et oui, qui l’eut cru ? Naëlle aimait lire à ses heures perdues. Il n’y avait que de très rares personnes qui le savaient et ceux qui le découvraient, avaient du mal à le croire.

- Il faut qu’il y ait des vampires, des sorciers et autres créatures surnaturelles, reconnut-elle. Et des histoires d’amour et de savoir qu’elles se terminent bien !

C’était cliché mais véridique. Naé avait besoin de s’évader dans des univers fantastiques mais également que certaines histoires se finissaient bien. Parce que c’était tout autre dans la vraie vie.

- Café, peut-être ? proposais-je.

J’avais remarqué qu’elle avait son chocolat chaud mais je lui demandais si elle voulait changer ou autre chose. Je ne savais. Je posais seulement la question, c’était mon côté avenant qui parlait.

Pendant que je me servais moi-même mon propre café, j’écoutais ce qu’elle me disait, notamment vis-à-vis de ses goûts pour les créatures surnaturelles. Pourquoi pas ? Je ne m’arrêtais vraiment à une catégorie précise, bien que j’avais mes préférences. Dans ce thème-là, j’avais mes propres classiques. L’une des premiers œuvres qui me venait à l’esprit dans ce thème-là était bien sûr « Dracula » de Bram Stoker.

- Dracula ? Bram Stoker ?

Je ne savais pas si elle l’avait lu mais qui dit aimer les vampires, pour moi, c’était évident d’avoir lu ce livre qui était bien l’un des piliers, un chef-d’œuvre de la littérature romantique et fantastique. A comparer avec d’autres livres dans le même genre, ça n’équivalait pas spécialement à celui-là à mon humble avis. On pouvait même comparer aux adaptations cinématographiques, il y avait de quoi dire aussi.

- Oscar Wilde disait de cette œuvre qu'elle était, peut-être, le plus beau roman de tous les temps. Je ne sais pas si j’en dirais plutôt la même chose mais j’avoue qu’il a bien réussi à cristalliser le mythe du vampire, continuais-je.

Je partis m’asseoir sur le bord de mon lit, non loin de là avec ma tasse de café au creux de mes mains, voulant continuer à échanger sur le sujet avec la demoiselle.

Quand il lui demanda si elle désirait du café, elle regarda sa tasse de chocolat avant de répondre.

- Merci de me le proposer mais je n’ai pas encore fini mon chocolat, fit la réponse de la métisse.

Il fallait reconnaitre que Riley faisait tout son possible pour la mettre à l’aise mais elle avait du mal à se détendre. Comme à son habitude, mille et une question se bousculaient dans sa tête et trouvaient des réponses tout aussi farfelues les unes comme les autres. La lycéenne répondait aux questions posées avec sincérité parce qu’elle était comme ça. Même si elle appréhendait les réactions de ses interlocuteurs. Donc, elle énuméra les univers qui avaient sa préférence. Il en fallait pour tous les gouts, même si elle avait conscience que ça ne la rendait que plus vulnérable car elle appréciait les « Happy End » parce qu’elle trouvait qu’il y avait trop de malheurs dans la vie de tous les jours.

- Un classique, reconnut la demoiselle.

Effectivement, elle l’avait lu il y avait belle lurette et il lui faudrait le relire afin de se remémorer quelques passages. Comme en comprendre certains autres qui restaient mystérieux à ses yeux. Dans les faits c’était un très bon livre, avec des thèmes récurrents : peur de l’inconnu, la folie, une histoire d’amour impossible, etc…

- Je ne sais pas trop, même si je reconnais que c’est un beau roman ! avoua-t-elle et ne sut si elle devait continuer ou non. Elle avait la sensation d’être sur un terrain miné et d’être jugée pour ce qu’elle pourrait dire sur le sujet. Honnêtement, j’ai mal pour « Dracula » parce que c’est lui qu’on rejette alors qu’il ne demande qu’à être un homme comme les autres, même s’il se nourrit du sang d’humain. On veut le tuer parce qu’on ne connait pas sa nature et que personne ne veut en savoir plus, sauf Mina qui tente d’apaiser les esprits. Elle en parlait comme elle avait ressenti les choses durant sa lecture mais aussi parce qu’elle connaissait ce sentiment. Cela dit, Mina lui offre le plus des cadeaux : son amour.

Oui, la jeune femme avait retenu l’histoire d’amour même si au final ce n’était pas réellement une fin heureuse. Si c’est souvenir été bon, le vampire la transformait à moins qu’elle ne confonde avec quelque chose d’autre qui y ressemblait étrangement. Et elle ne pensait absolument pas Twilight.

- C’est peut-être un peu trop cliché, ce que je viens de te dire, avoua-elle. Ce qui fait que j’ai probablement occulté beaucoup de sujets traités dans le récit. Et toi, si tu étais l’un des personnages tu penses que tu aurais pu être qui ?