Come What Way [Krystin]

Depuis qu’elle avait quitté l’entreprise Hewson, Krystin enchaînait répétition et répétition pour son prochain spectacle à Broadway. En fait, c’était peut-être son premier vrai spectacle. Et autant dire que la demoiselle n’y allait pas à moitié. Depuis qu’elle s’était faite approchée par Golman, elle faisait de son mieux pour ne pas le décevoir et prolonger le contrat. C’était un bon parti, vu ce qu’Aymeric lui avait dit durant une soirée bourgeoise. Aymeric… Le jeune homme aux boucles blondes qu’elle n’avait même plus revu non plus depuis qu’elle avait quitté la boîte de strip-tease de son père. Elle avait quand même réussi à lui faire décrocher un « salut » alors qu’elle lui faisait ses adieux. Bon, c’est vrai qu’ils ne s’étaient pas quittés en bons termes non plus, depuis l’histoire de la plage. Et plus elle y repensait, plus elle se disait qu’elle s’était peut-être montrée un peu trop dure. En même temps, c’était son caractère et elle savait pertinemment qu’elle ne pouvait pas le changer même si elle essayait et qu’elle y mettait tous ses efforts. Son caractère reviendrait vite au galop. Et d’ailleurs, pourquoi elle n’arrêtait pas d’y penser? Aucune idée. Mais elle devait vite y renoncer, car elle n’allait plus jamais revoir Aymeric. Autant y tirer un trait.

Une autre raison pour qu’elle arrête d’y penser : la représentation de ce soir. Oui, c’était sûrement la première grosse pièce de théâtre qu’elle allait commencer à jouer en tant que comédienne de Broadway. Beaucoup de monde serait présent, les places avaient été quasiment toutes vendues. De quoi réjouir la demoiselle autant que la stresser. Tout le gros gratin de New-York serait présent. Alors, elle se devait de leur montrer la talentueuse comédienne qui était en elle. Et le moins que l’on puisse dire c’est qu’elle le réussit à merveille. Elle connaissait son texte sous le bout des ongles et elle joua comme jamais elle n’avait joué la comédie. En gros, elle s’y était donné à fond. Et à en entendre les applaudissements, elle savait qu’elle avait réussit.

Retournant dans sa loge, un grand sourire aux lèvres, Krystin s’entreprit d’ôter son costume et de se démaquiller. Elle était fière d’elle, jamais elle n’avait été aussi fière. Et il y avait de quoi. Elle venait de se produire sur les planches de la célèbre compagnie de Broadway. Ce n’était pas donné à tout le monde! Et le meilleur : elle y avait sa place désormais. Elle resta dans sa loge, le temps de se remettre de ses émotions et également le temps que les spectateurs s’en aillent. Elle n’avait pas trop envie d’en croiser, elle voulait plutôt être tranquille ce soir. Une fois prête pour sortir, elle mit son sac sur l’épaule, se regarda une dernière fois dans le miroir puis sortit de la loge. Elle emprunta le couloir pour descendre les escaliers qui menaient au hall du bâtiment et… Hein? Qu’est-ce que la touffe blonde faisait là? Qu’est-ce qu’Aymeric faisait à Broadway? Krystin ne put s’empêcher de s’arrêter au milieu des escaliers, tellement la surprise l’emparait. Il était avec Pride. Ah ce sacré Pride. Mais il partait maintenant, laissant le blondinet seul. La jeune femme ne put s’empêcher de sourire. Elle qui croyait ne plus le revoir, elle le voyait là dans le hall de Broadway! Il avait assisté à la pièce alors? Toujours avec un petit sourire, elle descendit les escaliers qui restaient puis se dirigea vers le jeune homme, jusqu’à lui tapoter l’épaule :

- Alors Aymeric, tu t’es perdu?

Elle savait très bien que ce n’était pas le genre d’endroit du blondinet. Alors, qu’est-ce qu’il faisait là? Il était venu pour elle? Ca, ça l’étonnerait vraiment.

Jamais elle n’avait cru le recroiser, du moins pas dans cet endroit. C’était pour ça qu’elle lui avait demandé s’il s’était perdu, parce que c’était étrange –même si elle ne le connaissait pas autant que ça- qu’il vienne se promener à Broadway, ou du moins qu’il assiste à une représentation théâtrale qu’elle venait de donner en plus. La seule chose qu’elle n’avait pas prévu, c’était qu’il la rejette. Ils ne s’étaient pas quittés en bons termes, ça on pouvait le dire, donc rien ne lui garantissait qu’il se montre amical avec elle. Mais heureusement, rien de tout ça ne se passa. Krystin se demanda même s’il était content de la voir, car il répondit presque… normalement. Et même avec une pointe d’humour, si ce n’était pas beau tout ça? Krystin eut un petit sourire. Alors il ne lui en voulait plus visiblement? Comme quoi, on pouvait dire que leur relation était sacrément bizarre, des hauts et des bas. Ils allaient finir par en avoir le tournis! Et puis, elle finit par savoir ce qu’elle voulait savoir. Il l’avait donc vue sur les planches, il avait suivit la pièce alors! Ne demandez pas pourquoi, mais cela faisait plaisir à la demoiselle. Bon apparemment, il n’était pas venu ici pour ça. Mais bon, ça faisait toujours plaisir d’avoir des nouveaux points de vus. Surtout celui d’un type comme Aymeric. Alors comme ça, il avait trouvé ça sympa?

- Juste sympa?

Dit-elle en haussant un sourcil et un petit sourire en coin. Même si elle savait pertinemment qu’un simple « sympa » devait dire qu’il avait pas mal apprécié ses talents d’actrice. La chose qu’elle n’avait pas prévue non plus, c’est qu’elle reste en blanc, qu’elle ne dise plus rien. En fait, elle ne savait pas trop quoi dire. Qu’est-ce qu’on dit à ces moments là? Je suis contente de te revoir? Non, ça faisait trop la fille en manque de quelque chose. Et bien, rien à dire, ça lui en bouchait un coin à la demoiselle. Elle qui savait toujours quoi dire, quoi critiquer ou autre là, elle était complètement muette. Mais heureusement –si on pouvait dire ça comme ça-, une autre personne vint les rejoindre. Et cette personne portait le nom de Golman. Avec un sourire jusqu’aux oreilles il se dirigea d’abord vers la jeune femme en la prenant presque dans ses bras :

- Krystin, tu as été plus que merveilleuse!

Oui avec les affaires, on se tutoie vite hein. La blondinette ne fit qu’hocher la tête avec un grand sourire. Puis voyant que la demoiselle ne se trouvait pas seule, Golman se tourna vers Aymeric en lui tendant la main :

- Aymeric Hewson je présume? Je suis Jack Golman.

Ramenant ses mains dans ses poches, il fixa ensuite les deux jeunes gens qui se trouvaient devant lui puis dirigea une nouvelle fois son attention vers le blondinet :

- Vous devez être fier de votre petite amie.

Krystin ne manqua pas de s’étrangler avec sa pauvre salive. De quoi? Où? Quand? Aymeric et elle, ensemble? Ce n’était pas…

- Pride l’a laissé échappé lors d’une de nos conversations.

Et mince. Il ne pouvait pas tenir sa langue, ce n’était pas croyable. Maintenant Golman aussi croyait qu’ils étaient ensemble. Il fallait faire quoi alors? Que Krystin prenne la main d’Aymeric ou qu’elle lui donne une marque d’affection. Et même quand elle n’était pas sur les planches, elle devait jouer la comédie. Heureusement qu’elle était bonne actrice, mais cette fois-ci elle ne fit que sourire poliment à son producteur et attrapa la main d’Aymeric. Bah quoi, c’était son petit ami hein?

Et c’était repartit pour un tour. Aymeric et Krystin formait un couple alors. Enfin, un faux mais un vrai aux yeux de tout le monde et principalement aux yeux de Golman en cet instant même. Alors quoi de mieux que de continuer à jouer à la comédie? Et il fallait dire que le blondinet s’y prêtait vraiment bien au jeu, en la prenant par la taille et en plaçant un petit chérie par ci, par là. Il s’autorisa même à l’embrasser sur le front, comme quoi il ne jouait pas à moitié. Un peu déconcertée sur le coup, Krystin ne fit qu’hocher la tête et répondre par des sourires tant les deux hommes étaient dans leur délire. Sauf que hein? Golman voulait annoncer quelque chose et il annulait ce qu’il avait ce soir. Oh trop aimable à lui. Pendant qu’il partait voir sa secrétaire, la jeune femme sentit Aymeric s’approcher d’elle et lui souffler quelque chose à l’oreille.

- Tu ne trouves pas qu’on s’est déjà assez engueulé déjà?

Dit-elle avec un demi-sourire. Oui, combien de fois ils s’étaient crié dessus les deux petiots? A croire qu’à chaque fois qu’ils se voyaient, ça se terminait mal. Ca partait vraiment en cacahuète. A cause de leurs caractères? Hum, la majeure partie était à cause du tempérament de la demoiselle, et ça elle ne pouvait pas le nier. Mais là, s’engueuler devant tout le monde et pour de faux? Ca non. De un, ça ne faisait pas bonne impression, l’actrice qui vient de terminer sa représentation et qui crie comme une dingue. Et de deux, elle n’avait pas trop envie. En fait, c’était assez drôle comme situation. Ah tiens, Golman revenait apparemment libre pour la soirée pour les deux jeunes gens. Quelle chance! Allons y pour un café alors, puisque Golman tenait à ce qu’Aymeric sache ce qu’il allait dire à Krystin.

- Je connais un bon petit bar pas loin d’ici.

Cool. Krystin commençait vraiment à se demander ce qu’il allait lui annoncer. Ca devait être important vu la façon dont il en parlait et de la tournure que prenait les choses. La jeune femme se détacha d’Aymeric un instant pour commencer à suivre son producteur hors du hall. Et visiblement, il vit que la jeune femme était un peu libre de son compagnon, et il en profita pour passer un bras autour de son épaule tout en marchant vers le soit disant bar, laissant le blondinet derrière eux :

- Tu verras ma belle, tu ne pourras pas refuser.

- Refuser quoi?

- Oh, attends que nous soyons installés. Ah, c’est ici.

Effectivement, c’était bien à côté de Broadway. Tel un gentleman, Golman laissa entrer Krystin d’abord puis s’engouffra ensuite à l’intérieur, suivit de près par Aymeric. Ils s’installèrent sur une table, le producteur prenant soin de se mettre en face de la starlette. La serveuse intervint immédiatement et il commanda trois cafés. Impatiente, Krystin fixait Golman. Qu’allait-il bien lui sortir? Ce dernier joignit ses mains puis regarda intensément la demoiselle avant de se lancer :

- Bon alors, pour faire court : certains producteurs de Los Angeles t’ont repérée et ils souhaiteraient te voir pour tourner un film.

Déjà? Cela faisait à peine un mois qu’elle était à Broadway et on l’avait déjà repérée pour carrément changer de film et de jouer devant une caméra? La surprise fut telle que la demoiselle ne trouva pas quoi dire pour répondre à son producteur. Juste un sourire béat se dessina sur ses lèvres.

- Ce n’est pas donné à tout le monde Krystin.

- J’en ai bien conscience.

Oh oui, elle le savait pertinemment. C’était très compliqué d’entrer dans ce monde là, de Los Angeles, d’Hollywood. Qui n’y avait jamais rêvé? Mais n’était-ce pas un peu précipité? Quitter New-York, changer encore une fois de ville. Elle s’y était habituée quand même. Golman attrapa les mains de la jeune femme qui étaient posées sur la table puis lui dit :

- Penses-y ma belle.

Puis sans lui lâcher les mains, il se tourna vers Aymeric avec un petit sourire pendant que la serveuse posait les cafés devant les trois personnes :

- Et vous, qu’en pensez vous? Vous suivrez Krystin jusqu’en Californie?

Krystin se retint de rigoler en se mordant la lèvre inférieure. Curieuse de savoir ce que le blondinet allait répondre à ça, elle tourna son regard vers lui. Vive la comédie!

Comment ne pas en rire de ça ? Comme situation ? Ils s'étaient engueulés ainsi ? Soit. C'était vrai. Mais la faute à qui ? Aymeric savait rester zen, et de toute manière, comme il était du genre à ne parler à personne, étant solitaire... Mais il fallait vraiment y aller pour l'énerver. Enfin passons, Golman maintenant, ici présent... Aymeric ne put s'empêcher de lui lancer un regard suspicieux...
Et avait-il tort d'être méfiant ? Profitant que Krystin et lui se détachent, il passa un bras autour de l'épaule de la jeune femme. Il sautait sur n'importe quelle situation, lui ? C'était une chose...
Sortant du théâtre, apparemment le café n'était vraiment pas loin. Oui, en effet, il était juste à côté... Bien, ça fera moins loin à marcher. Clair et net, et Golman pourrait aller droit au but et Aymeric pourrait s'en débarrasser. Dans quel merdier s'était-il encore embarquer ? Il n'avait pas besoin de faire tout ce cinéma... Mais il ne pouvait empêcher de regarder du coin de l'oeil ce Golman qui ne le calculait plus du tout, il ne voyait que Krystin, et rien d'autre. Et ça, c'était d'une frustration... Le blondinet pourrait s'en aller, ça reviendrait au même, il ne se rendrait même pas compte, cet enfoiré !!! Il tira sa chaise d'une nonchalance pour pouvoir s'asseoir dessus, à côté de Krystin, écoutant attentivement ce qu'annonçait Golman, après avoir commander trois cafés... Un film ? A Los Angeles ? Aymeric enregistra ses informations dans son cerveau... Et tous ces gestes surtout. Ouais, il continuait de le surveiller, il le dévisageait comme le ferait un flic analysant chaque geste traître... Golman n'était pas du tout culotté, hein ? il se penchait vers Krystin, prenait ses mains... Comme si c'était sa poupée, son actrice favorite, sa chouchoute... C'était agaçant. Très agaçant. Et ça pouvait se voir sur son visage au blondinet...

Et qu'en pensait-il, lui ? Ah voilà qu'on lui demandait son avis maintenant ? Ca y était, il existait ? Et s'il serait capable de suivre Krystin jusqu'en Californie ? Etait-ce un test ? Ou était-il pressé, du genre, si le chacal ne serait pas capable de suivre, donc le loup pourrait plus profiter de sa jolie proie qu'il avait entre les pattes. Oui, la comparaison était comme ça. Il ne fallait pas croire que tout ça était de la jalousie... Oh non ! Golman ne lui inspirait pas du tout confiance, c'était tout. Il paraissait trop gourmand.

Les cafés arrivèrent. Après que le serveur partit à l'autre bout de la pièce, Aymeric s'accouda sur la table et fronça les sourcils.

Dîtes-moi, Monsieur Golman, vous envoyez directement vos actrices au bout du pays, comme ça ? De quel film s'agit-il ?

Quoi ? Qu'est-ce qu'il y avait de mal à être un peu curieux ? Pour quel genre de film, les producteurs ou lui avaient prévu pour Krystin ? Un film d'action ? Quel serait son rôle ? Si c'était pour faire du trafic et l'envoyer pour des films X, ou non ? Quel serait le salaire ? Ou des fois, les producteurs faisaient des promesses et les actrices avaient des petits rôles... Bon, c'était déjà pas mal, mais pour les mettre au devant de la scène, il fallait en faire du chemin... Aymeric savait parler affaire.

Qu'est-ce que vous pouvez nous dire de plus ?

Votre question est légitime, Monsieur Hewson. Je comprends que vous avez besoin toutes informations pour laisser partir Krystin à l'autre bout du pays, comme vous dîtes, et...

Ouais, genre, Golman pensait que la Californie était à côté de New York comme serait ce bar à côté du théâtre. Bien sûr. Il avait fumé quelque chose, lui !

La laisser partir ? Réagit Aymeric, ne perdant rien aux paroles de ce type.

Laissez-moi terminer,... sauf si bien sûr vous la suivez, aussi... Ca sera un film d'aventure avec un très bel acteur, je ne citerais son nom pour pas trop vous emballer...

Ouais, c'était plutôt lui qui s'emballait lui-même tout seul mais Aymeric se retint de faire cette remarque.

Ca se passera dans la forêt Amazonienne avec un archéologue comme personnage principal... Il sera avec une assistante que les producteurs cherchent en ce moment.

Ah ok. Il avait l'air cool ce film. Didiou !

D'autres questions ? continua-t-il avant d'enchaîner sur autres choses pour faire sa pipelette... et...

Vous pouvez enlever vos pattes ? lâcha Aymeric avec un regard tueur...

Ouais ce maudit type tenait toujours les mains de Krystin, comme si elle était sa copine.

Et bien, tout ce qu’elle pouvait dire c’est qu’Aymeric jouait pas mal la comédie. Enfin, si seulement il la jouait. La façon dont il avait de lancer les regards à Golman, on aurait presque dit que c’était… naturel. Il avait complètement l’air de se soucier de Krystin, de s’inquiéter pour elle. Tellement ça sonnait juste, la demoiselle avait envie de sourire. Elle lui demanderait plus tard comment ça se faisait, s’il avait des talents d’acteur cachés ou si tout simplement c’était vrai qu’il s’inquiétait pour son avenir. Oui, ça c’est une question qu’elle lui réserverait. En attendant, elle observait la scène qui se déroulait. La conversation entre Aymeric et Golman. Ca avait l’air presque tendu entre les deux hommes. Mais en même temps, elle apprenait des choses grâce à la curiosité d’Aymeric. Il avait l’air pas mal ce film, ça faisait un peu genre Indiana Jones? Elle ne savait pas si elle serait à la hauteur pour dans un film d’aventures, mais elle avait réussi à jouer sur les planches de Broadway, alors ça ne devait pas être trop dur de jouer l’assistante d’un archéologue. Et qui serait cet acteur? Il était connu apparemment, vu que Golman ne voulait pas dire son nom. Oh, il pouvait lui dire quand même! Ca lui mettait l’eau à la bouche tout ça. Et puis… qu’est-ce qu’il venait de lâcher Aymeric là? Sur un ton menaçant qui plus est. Ah oui, Golman tenait toujours les mains de la jeune femme. Sur le coup, ça n’avait pas trop dérangé Krystin mais apparemment, ça dérangeait Aymeric. Elle ne put s’empêcher de tourner la tête vers lui, les sourcils froncés. Il continuait dans son délire de comédie?

- Cela vous dérange Monsieur Hewson?

Golman soutint le regard d’Aymeric, limite s’il n’avait vu son regard noir ou la façon dont il avait dit les choses. Comme s’il n’avait pas peur de lui. Krystin observa les deux hommes, puis c’est elle qui lâcha les mains de son producteur, puisque ce dernier n’en avait pas décidé ainsi. Elle prit ensuite sa tasse puis bu un peu de café.

- En tout cas, je suis désolé si cela vous a perturbé. Mais voyez-vous, j’aime être proche de mes actrices.

En suivant le geste de Krystin, il attrapa lui-même sa tasse puis la porta à ses lèvres. Portant son regard à nouveau sur la demoiselle puis annonça :

- Il faudra qu’on reparle de ce projet, rien que tous les deux.

Ah c’est bon avec Aymeric s’était terminé? Il ne voulait plus l’avoir avec lui? Il se passait quoi entre les deux hommes là? Golman avait toujours ce respect pour le blondinet, mais il semblait maintenant un peu ennuyé par sa présence depuis qu’Aymeric lui avait dit d’hôter les mains de celles de Krystin. En tout cas, la jeune femme acquiesça de la tête puis répondit :

- Oui bien sûr, je verrai quand je suis libre.

Elle ne savait pas encore très bien si elle allait accepter ou au contraire, repousser cette offre, mais c’était quelque chose qu’elle ne devait pas penser à la légère.

- J'ose espérer que cela ne vous dérange pas Monsieur Hewson? Que je me retrouve avec votre petite amie? Je préfère demander.

Et si Aymeric lui interdisait, ça lui ferait quoi? Vraiment bizarre comme situation, mais c’était assez drôle à voir. Enfin, Krystin se posait beaucoup de questions maintenant sur la réaction que le blondinet avait eu envers Golman.

Golman ne s'attendait peut-être pas à ce qu'Aymeric devienne un peu brutal, qu'il saute sur l'occasion des questions pour ça... De toute manière, pas besoin de cette occasion. Aymeric aurait fini par craquer d'une façon ou d'une autre. Il ne gênait pas pour dire les choses. Ca devait se voir que le blondinet n'avait pas l'air d'apprécier son interlocuteur, vu la tournure que prenait la conversation. Ou du moins, qu'il n'était pas aussi naïf. Il en avait vu des gars, à son disquaire, ou n'est-ce que les gars auxquels il vend de la dope... ou n'était-ce que les gars qu'il croisait dans la boîte de son père, ou dans les soirées où il allait...

En tout cas, ça ne sera pas avec ce regard là qu'Aymeric sera déstabilisé ou descendrait de ses grands chevaux... Golman pourrait soutenir ses regards, pourrait faire ou dire ce qu'il voulait... Non, ça ne marchera pas.

Non mais continuez ! Je vous en prie ! Lâcha Aymeric, ironiquement.

Comme si ça ne pouvait pas le déranger, sérieusement. Et on parlait de respect ? S'il en avait, il se tiendrait à carreau. A croire que s'il réagissait ainsi, c'était comme s'il n'était pas spécialement dupe, comme s'il avait compris le manège du faux couple... Genre il savait qu'ils n'étaient pas réellement ensemble donc il ne se gênait pas du tout

Et Krystin dans tout ça, elle ne disait pratiquement rien et se laissait faire. C'était pas un peu drôle, non ? Qu'elle ne réagisse pas ? Bien que le fait de jouer à Broadway et le fait d'aller surement plus loin étaient ses rêves. Ayant du caractère, il ne doutait pas qu'elle ne se laissait pas marcher dessus – vu le nombre de fois qu'ils s'étaient pris la tête tous les deux... Mais le prix d'Hollywood, qu'elle avance avec précaution pour ne pas aller dans la cage aux lions, non ? Qu'elle ne soit pas naïve... Mais heureusement, au non-réaction de Golman, ce fut elle qui enlevait ses pattes...

Proche ? Jusqu'à quel point ?

Pas qu'il ne manquait de respect soudainement... Mais Aymeric avait soudainement une mauvaise image, ou qu'il avait peur de lire entre les lignes de ses paroles.... Si ces maudites paroles n'avaient pas un double sens, du genre "promotion canapé.

Mais en tout cas, au regard de Golman en ce moment même, le blondinet comprit qu'il allait un peu trop loin selon lui... Non, il ne faisait pas bouffer par la jalousie. Ce n'était pas ça du tout... Et maintenant, regrettait-il le fait d'avoir inviter Aymeric au café ? Peut-être qu'au fond de lui, il se maudissait, il aurait mieux aimé un tête à tête avec Krystin... Ben ouais, pour qu'ils parlent du projet rien qu'eux deux... C'était qu'il voulait la revoir ou quoi ? Et si ça ne le dérangeait pas qu'il la voit, seul ? Et qu'est-ce qu'en pensait Krystin là ? Et du film ? Si elle adorait le faire ? C'était quoi le script ? Pour voir ce qu'il y avait à jouer ? Non mais c'était vrai, c'était toujours intéressant de voir les scènes avant ? Et il n'y avait pas des castings... Bon, aussi, Aymeric lui avait coupé la parole, mais quand même...

Attendez là... fit-il calmement, pour ne pas paraître agressif même s'il l'avait tout à fait envie de l'être... Pourquoi que tous les deux ? Vous pouvez très bien en parler maintenant, non ? Puisque vous avez annulé apparemment ce que vous avez à faire ce soir pour nous en parler...

Ouais car l'emploi du temps de Golman devait être charger, aussi, non ?

C'est quoi votre truc ? Embobiner les gens ?

Je ne vous permets pas de m'insulter de la sorte. Je vous prierai de ranger votre arrogance.

Ah, parce que ça vous dérange ?

Ouais, Aymeric ne se laissait pas démonter.

Vous avez voulu mon avis!

Qu'il assume!

Je suis très curieux...

C'était tout.

Krystin suivait toujours la scène qui se déroulait devant ses yeux avec attention. Le ton ne montait pas entre les deux hommes, mais elle voyait nettement que la sympathie et le respect commençait à descendre par contre. Ce qui était drôle en fait. Toute cette histoire, alors qu’Aymeric et elle n’était même pas ensemble. Elle ne savait pas si Aymeric continuait à jouer la comédie ou s’il en avait carrément marre des manigances et des sous-entendus que faisaient Golman. Elle n’était pas naïve non plus la petite. Mais c’était quand même grâce à ce producteur qu’elle avait obtenu plein de choses, elle n’allait pas l’oublier. Il n’allait rien lui faire hein? C’était peut-être pour ça qu’elle se la fermait en ce moment. Elle se sentait plus que protégée, puisqu’il y avait Aymeric à côté d’elle. Golman ne pouvait rien faire. Et puis, mais… qu’est-ce qu’il sortait le blondinet là? Il allait trop loin là, vraiment trop loin. Krystin tourna les yeux vers lui, en fronçant les sourcils puis lui dit à voix basse :

- Arrêtes Aymeric.

Elle ne savait plus si c’était vrai ou faux sa colère ou on ne sait quoi. Ouais elle était complètement perdue la pauvre. S’il jouait toujours la comédie, il fallait qu’il baisse d’un niveau sinon Golman partirait avec son film en main. Hors elle y tenait tout de même à cette proposition, même si elle n’avait pas encore décidé si elle allait y aller ou non.

- Je ne fais que mon travail. Vous voulez peut-être m’apprendre à le faire? Vous avez parfaitement l’air de vous y connaître.

Golman posa sa tête sur la paume de sa main, observant Aymeric sérieusement avant d’ajouter :

- Allez-y, je vous écoute.

Krystin leva les yeux au ciel. C’était quoi ce merdier? On aurait carrément dit deux gamins en train de se disputer pour savoir qui était le plus fort. Ils étaient venus pour elle non? Et bah alors.

- Non, en fait non, je ne vais pas vous écouter. C’est vous qui allez m’écouter. Krystin est mon actrice, je la suis, je lui fais part des meilleures offres, je la conseille et je la vois en privé lorsque je veux. Pas vrai ma belle?

Ah tiens, c’est bon? Elle existait? Ramenant ses yeux vers son producteur, elle lui répondit en soupirant :

- Tu ne crois pas que tu en fais un peu trop?

Ca y’est, le caractère de Krystin revenait à l’attaque! Comme quoi, ça avait manqué ce truc.

- J’essaye juste de faire comprendre à ton… charmant petit ami, en quoi consiste mon boulot.

Krystin ne savait pas trop pourquoi, mais cette fin de soirée ne sentait pas très bon. Elle qui croyait avoir très bien terminé sa soirée avec son succès au théâtre voilà qu’une nouvelle chose éclatait un peu plus tard. Et là ce n’était pas entre Aymeric et elle, non, non, sinon ça ne serait pas drôle : c’était entre Aymeric et Golman. Une petite dispute en sous-entendus, et en gardant leur calme, ce qui était assez comique. Ca faisait genre professionnel. Krystin était étonnée qu’Aymeric ne soit pas passé au degré supérieur. Tout simplement parce que c’était de la comédie et qu’il ne fallait pas aller plus loin hein? Sauf le truc qu’elle n’avait pas prévu, c’était que Golman repose les mains sur les siennes, vu qu’elle ne les avait pas enlevées après qu’elle ait bu son café.

Aymeric jeta un regard sur Krystin qui lui soufflait d'arrêter. Pourquoi devrait-il arrêter ? Pourquoi donc ? Il aimerait bien, ou plutôt pas. Alors pas du tout. Il ne pouvait s'en empêcher... La colère montait en lui. Il en bouillonnait et il n'allait pas tarder à exploser si cette situation continuait. Golman ne lui accordait aucun respect alors pourquoi Aymeric ne devrait-il pas lui renvoyer la même chose ? Il devrait se laisser humilier ? En fait, la seule chose qu'il se supportait pas, c'était comment il profitait de la situation, surtout au niveau de ses actrices... Il était un homme, un grand homme et pour élever ses petites poules au plus au niveau, il fallait qu'elles fassent tout ce qu'il leur demandait ? Ca, franchement, Aymeric avait envie de lui cracher à la figure quand cet enfoiré lui lançait qu'il écoutait, tout ouïe que le blondinet le lui explique, et évidement, il continuait son baratin. C'était lui le mieux placé, évidement. C'était le plus fort. Aymeric ne put contenir sa colère intérieure qu'il serra son poing, limite à s'enfoncer les ongles dans sa paume. Il fallait qu'il garde son calme. Un peu encore. Peut-être était-ce la réplique de Krystin qu'il ne le faisait pas encore exploser. C'était bon, son caractère ressuscitait ? Hallelujah. Mais non, il ne fallait pas se retenir !

Depuis le temps qu'Aymeric se concentrait pour ne pas exploser, ben voilà le détonateur du siècle... Déjà au niveau de la dernière réplique de Golman, mais surtout au niveau de son geste qu'il venait de faire... Il remettait ses mains sur celles de Krystin. Il ne se gênait pas et il le faisait vraiment exprès, quoi !

Votre job consiste plutôt à regarder les gens de haut et de les prendre pour des cons ?

Ca l'amusait de narguer les gens, ce mec... Il se voyait vraiment tout permis. Ca devenait insupportable.

Si vous ne voulez pas mon poing dans la gueule, vous devrez rester un peu plus professionnel que ça...

Et vlan, oui, qu'il reste un peu plus professionnel en annonçant seulement ce qu'il avait à proposer comme films, ou il ne savait quoi à Krystin, c'était tout.

Allez, soyez malin !

Ouais, Golman n'était à moins que rien. S'il avait été un peu plus malin, il éviterait tout ce genre de geste devant les yeux du « petit ami ». Mais il le faisait exprès... A croire que oui puisque c'était lui qui avait suggéré à Aymeric de venir, il avait prévu son programme d'avance ? Mais Golman ne lâchait en rien, non ? Il se contenta seulement de regarder Aymeric de travers... Ce dernier ne put s'empêcher de se lever brutalement de sa chaise... Il allait vraiment lui démonter la gueule s'il ne prenait pas ses jambes à son cou, à moins qu'il ne tenait à sa vie.... Le blondinet ne lâcherait pas du tout l'affaire. Golman pouvait se mettre le doigt dans l'oeil. Ce dernier tenait toujours les mains de Krystin, les caressant même avec ses pouces.

On s'appelle !

Il ne se priva pas non plus à lui donner une baiser sur la douce main de Krystin, tel un gentleman... et de lui faire un clien d'oeil. Aymeric leva les yeux au ciel. N'importe quoi ! Il se retenait mais Golman faisait vraiment tout pour l'énerver... Maintenant que celui-ci s'en allait, Aymeric se rassit, se concentrant sur le café qu'il avait sous les yeux...

Quel con... souffla-t-il.

Krystin remarqua qu’Aymeric n’en avait rien à faire lorsqu’elle lui demanda d’arrêter. Au contraire, il continuait de plus belle. Ca tournait franchement à l’étrange tout ça. Et puis Golman ne se faisait pas prier pour continuer à narguer le blondinet non plus. En remettant ses mains sur celles de la demoiselle, qui n’eut pas le temps de réagir. Ouais, c’était plutôt son soit disant petit ami qui réagit plus vite qu’elle en menaçant le producteur de lui mettre un pain dans la face. Le ton montait maintenant entre les deux hommes, et ce n’était pas que Krystin qui l’avait remarqué. Quelques personnes qui étaient tranquillement assises sur la table d’à côté, tournaient curieusement leurs têtes vers la scène qui se déroulait. Mais le moment où presque la moitié du bar tourna la tête vers leur table c’est quand Aymeric se leva brutalement de sa chaise. Mais qu’est-ce qu’il lui prenait? Il prenait son rôle de petit-ami très à cœur à ce qu’elle observait. Mais là, c’était un peu trop. Limite si elle ne l’aurait pas tiré par la chemise pour qu’il se rasseye en le traitant d’idiot. Alors qu’elle le regardait, la surprise devait se lire dans les yeux de Krystin. Il faudrait qu’elle lui demande des choses après. Ah, bah ça serait bientôt vu que Golman se décidait enfin à partir. Il valait mieux, vu le regard que lui lançait le blondinet. La jeune femme ne fit qu’hocher la tête lorsque le producteur s’adressa à elle, puis le suivit du regard jusqu’à qu’il franchisse la porte du bar. Bon, ça sera à eux de payer la note alors. Cool, c’est lui qui invite mais c’est les invités qui payent, super logique. Alors qu’Aymeric maudissait Golman et se rasseyait, Krystin tourna la tête vers lui :

- Quelle mouche t’a piquée Aymeric?

Enfin maintenant elle pouvait poser toutes ces questions qui la tracassaient depuis leur arrivée au bar. Elle regarda autour d’elle, encore quelques personnes les regardaient en faisant semblant de s’intéresser à autre chose, mais elle voyait bien qu’ils avaient pas mal profité de la scène. Elle reposa son regard sur Aymeric, puis tourna sa chaise de façon à être plus en face de lui :

- Tu jouais la comédie ou…?

Oui parce que s’il jouait la comédie, limite il fallait qu’elle le présente aux producteurs de Broadway. Ca avait l’air tellement réaliste cette scène, limite si on pouvait la mettre dans un film! En parlant de film, il fallait donc qu’elle réfléchisse à ce que lui avait proposé Golman. Si elle allait accepter ou non. C’est vrai que cette proposition était plutôt alléchante, et elle était flattée d’avoir été repérée pour ce rôle. Mais pour l’instant ce n’était pas trop ça qui l’inquiétait. C’était plutôt le comportement qu’avait eu Aymeric durant ces dernières minutes, et elle voulait des explications.

Pendant qu’Aymeric déballait son speech, Krystin l’observait sérieusement. C’était peut-être même la première fois qu’elle le dévisageait de cette manière là. Il commençait vraiment à l’intriguer. Ses manières, son regard qu’il avait eu sur Golman, lorsqu’il s’était levé de sa chaise, limite s’il n’allait pas défenestrer le pauvre producteur. Alors qu’il n’avait absolument rien à voir dedans, c’était seulement les affaires de la jeune femme. Soit, il jouait son petit-ami, mais là c’était carrément partit en cacahuète, il fallait quand même le dire. Donc en gros, elle ne savait vraiment pas quoi penser de tout ce qui venait de se passer. C’était une bonne situation étrange, et pourtant ils en avaient eus tous les deux! Et celle méritait à être dans la première place du podium. Elle découvrait chaque jour des choses en lui, c’était marrant. Alors, avait-il un talent caché pour la comédie? Baah, non elle ne le saura pas, puisqu’il ne fit que s’excuser à moitié pour ce qu’il venait de faire. Bon ce n’était pas trop grave, parce que Golman voulait tout de même qu’elle l’appelle, donc le projet de film n’était pas encore perdu. Ce n’est qu’à sa prochaine réplique, que Krystin ouvrit grand ses oreilles. On aurait dit qu’il s’inquiétait pour elle, genre que le producteur était un grand méchant et qu’il fallait qu’elle fasse attention. Elle n’avait pas rêvé là, si? En plus, c’était limite paradoxal ce qu’il disait :

- C’était presque toi qui me l’avait conseillé, tu t’en rappelles?

Oui, lorsqu’ils étaient à cette soirée bien bourgeoise dans un appartement de New-York. Alors qu’ils dansaient, le blondinet lui avait montré Golman du coin de l’œil et lui avait dit ce qu’il faisait, son rôle de repérer les futures grandes actrices. Certes, il n’avait pas l’air d’aussi bien le connaître puisqu’aujourd’hui il avait failli lui mettre un poing dans son visage. Krystin redoublerait de prudence alors, elle savait très bien dans quoi elle se mettait donc. Golman avait tout de même beaucoup fait pour elle, elle ne pouvait pas le nier. Et de plus, son agression lui avait appris certaines choses, elle ferait donc attention. Elle n’était pas si bête non plus. Elle le regarda sortir un billet de sa poche puis sourire face à sa remarque sur le fait qu’ils n’étaient pas ensemble. La demoiselle ne put s’empêcher de sourire à son tour, d’une pour ce qu’il venait de dire et de deux pour le sourire qu’il avait eu. Un sourire un peu timide, pas sûr de lui, confus. Et puis… non, mais il partait là? En lui souhaitant bonne chance, comme ça? Non, elle ne pouvait pas le laisser partir là. Instinctivement, elle lui attrapa le bras, le forçant à ne pas faire un pas de plus.

- Attends, tu pars comme ça?

Sans le lâcher du bras, de peur qu’il ne parte, elle attrapa la tasse de café de son autre main libre puis le termina. Elle se leva ensuite, libérant le bras d’Aymeric au passage, mit son sac sur l’épaule puis jeta un vague coup d’œil au bar : deux trois zigotos les regardaient encore. Elle soupira puis poussa doucement Aymeric avec elle pour aller à l’extérieur du bâtiment. Une fois dehors, elle laissa le blondinet se mettre à son aise puis se posta devant lui, croisant les bras, et le regardant dans les yeux :

- Tu n’as pas répondu à ma question : est-ce tu jouais la comédie, oui ou non?

Ouais il avait contourné la question le petiot. Hé, elle n’était pas idiote. Et puis, elle voulait vraiment savoir depuis ce temps. Elle ne le laisserait pas partir tant qu’il n’aurait pas répondu franchement à la question.

- Dis le moi, honnêtement. Ne mens pas.

Dit-elle en faisant un pas de plus vers lui. Et oui, ce n’est pas bien de mentir, il faut toujours dire la vérité!

Ouais, c'était vrai que c'était un peu contradictoire, tout ça... Il lui avait conseillé Golman, car il était un peu dans le champs de vision de leur danse, mais surtout qu'à travers cette soirée et toutes les personnes qu'il avait pu rencontrer, il lui paraissait le meilleur... Et pourtant, il semblait s'être tromper.

Il me semblait un peu plus professionnel que les autres, pas aussi stupide...

Et malsain que ça... Mais bon, autant ne pas peser ses mots. Maintenant qu'elle ne travaillait plus dans la boîte, qu'elle n'était plus dans sa vie, - d'ailleurs, elle n'était jamais vraiment rentrée, non ? - A quoi bon ? Il n'avait pas à se préoccuper du bien-être des danseuses... Et encore moins des ex-danseuses. D'ailleurs, elle semblait surprise de le voir partir, comme ça...

A quoi tu pensais ?

Il allait rester, comme ça, à parler comme deux bons vieux amis. C'était ce qu'ils étaient ? Un peu ambigu. Même s'il devait avouer qu'il était plutôt content de la revoir, il ne l'avouerait pas complétement. Il la regarda un peu amusé, du fait qu'elle le retenait, qu'elle finissait son café d'une traite – ouais comme s'il ne fallait jamais laisser une goutte, il ne fallait jamais gaspiller - et d'un geste automatique, qu'elle mettait son sac-à-main sur l'épaule... En plus, du fait qu'ils sortent dehors pour prendre un bol d'air frais... Ouais, au sein du café, ils paraissaient véritablement d'un couple... Ils n'étaient pas passés inaperçu... Mais quel plaisir de se retrouver dans la rue, éclairée par la lumière des lampadaires, et le ciel quelque peu étoilé. La ville était encore animée... Quelques gens se précipitaient pour rentrer, ou pour n'importe en réalité. Aymeric était plutôt concentré à se prendre une cigarette et à allumer. Il avait eu les nerfs à vif et le manque de nicotine s'était véritablement sentir. Il fuma une première gorgée, tout en dévisageant par la suite Krystin qui s'était mise face à lui. Elle ne lâchait jamais la grappe sur la moindre chose ?

Qu'est-ce que ça peut faire ?

Qu'est-ce que ça pouvait changer entre eux, s'il avait réellement jouer la comédie ou non ? Et il ne devait pas lui mentir ? Ca, c'était la meilleure... Là, un sourire stupide s'afficha sur ses lèvres, et de son pouce, il se gratta la joue. Ouais, il était presque amusé. Depuis le temps qu'elle le connaissait, le fait qu'elle puisse douter, était vraiment amusant. Sérieusement. Il laissa sa cigarette se consumer entre ses doigts et son regard replongea dans celui de Krystin, son beau regard émeraude.

Je te l'ai dit. Je ne le sentais pas ce type. Il prend facilement les gens pour des pigeons. Tu crois réellement que j'ai pu jouer la comédie ?

Non, il ne disait pas ça pour esquiver sa question ou quoique ce soit mais pour lui, ça lui paraissait d'une telle évidence que voilà, il pensait réellement que ça l'était aussi pour elle. Il ne la comprenait pas spécialement... Pourquoi n'avait-elle pas tellement ouvert sa gueule ? Bon, c'était certain, c'était le show business, il fallait faire son petit chemin pour faire ce qu'on voulait mais au point d'aller se faire marcher dessus et se faire exploiter de la sorte, c'était inconcevable...

Et franchement, ça change quoi ? Répéta-t-il... Tu vas jouer dans ce film, enfin tu vas toujours passer le casting, si tu le souhaites... Et puis quoi ? Je n'ai vraiment pas envie de me prendre la tête avec toi. Je n'ai pas à me justifier et à rendre des comptes à qui que ce soit.

Mais voyant que Krystin ne lâchera pas le morceau... Aymeric soupira. Il fallait tout lui expliquer.

Golman croit que je suis toujours ton « charmant petit ami », ça, c'était de la comédie, mais après ce que je lui ai dit... Je le pensais réellement, il a été irrespectueux, que je sois ton petit ami ou non. Tu comprends maintenant ou pas ?

Oui, ou pas, là ? Que ça lui monte au cerveau ? Bon, toujours la cigarette en main, Aymeric décida alors peut-être d'aller à sa voiture. N'était-ce pas plutôt une bonne idée ? Mais il regarda Krystin, attendant une de ses réactions.

Qu’est-ce que ça pouvait faire? Oh mais ça pouvait faire beaucoup de choses, il avait l’air de ne pas en avoir conscience. Déjà, ça changerait la vision que Krystin a pour lui. Bah oui, s’il ne jouait pas la comédie c’est qu’il en avait quand même quelque chose à faire d’elle et au contraire s’il jouait parfaitement la comédie, c’est qu’il n’en avait rien à faire d’elle. Donc oui, ça changeait tout de même la donne. Elle le regarda sortir une cigarette de sa poche puis l’allumer. Alala, toujours un aussi gros fumeur celui là. Si elle le pouvait, elle ferait comme la première fois qu’ils s’étaient rencontrés, elle prendrait tout son paquet de ces maudites clopes puis les jetterait dans l’égout d’à côté. Comme ça, il vivrait plus longtemps! Enfin, théoriquement. Un jour, il faudra qu’elle en discute avec lui. Enfin, si un jour se représentera, car peut-être qu’à la fin de cette discussion, ça serait bien la dernière fois qu’ils se verraient. Enfin bref, pour l’instant, il y avait Aymeric qui se justifiait devant elle. La jeune femme l’écoutait attentivement, les bras croisés sur sa poitrine, ne le cillant pas du regard. Genre ils allaient se disputer maintenant. Quoiqu’Aymeric ait une part de vrai dans ce qu’il disait, ils se disputaient à chaque fois qu’ils se quittaient!

- Mais on ne va pas se prendre la tête, je veux juste comprendre ton comportement.

Bon, c’est bon elle avait la réponse à question. Enfin, à moitié, parce qu’elle n’était pas encore satisfaite de ce qui disait le blondinet. Peut-être parce qu’elle aurait espéré entendre autre chose? Qu’il n’avait pas du tout joué la comédie, rien que pour… Oh mais non, c’était trop absurde. Et pourquoi elle commençait à penser à ce genre de choses? Elle s’en foutait de toute façon s’il avait joué oui ou non la comédie? Pourquoi elle y tenait autant? Si elle avait comprit? Mais quel humour il avait le petiot :

- Bien sûr que j’ai compris, ne me prends pas pour une idiote.

Elle avait l’impression qu’il la prenait comme telle, comme une parfaite idiote, qui n’avait pas de cerveau et qui ne comprenait rien à rien. Une blondasse quoi. Comme si tout ça devait être évident et qu’elle devait vite en tirer des conclusions. Mais bon, rappelons qu’Aymeric ne voulait pas se prendre la tête avec elle, et vice versa, donc Krystin préféra baisser le ton et se calmer. Elle commença à regarder autre part, passant une main dans ses cheveux. Puis dix secondes plus tard, elle reposa ses yeux sur Aymeric puis ajouta sur le ton de l’hypothèse :

- Et lorsqu’il a prit mes mains, que tu l’as menacé et que la deuxième fois tu t’es levé brutalement de la chaise… C’était aussi parce qu’il était irrespectueux? Parce que moi je ne vois rien de méchant là dedans. Je me trompe?

Dit-elle en haussant un sourcil, le fixant. Limite si elle n’allait pas rire. Parce que là c’est soit il jouait la comédie du petit ami jaloux, soit c’était carrément la réalité et il n’y avait aucun jeu de comédien là dedans. Parce qu’il était bien gentil de lui dire que Golman avait été irrespectueux, mais là, il n’y avait aucune raison de l’être, à part peut-être embêter Aymeric.

Oh bon dieu. Il n’allait tout bonnement pas la sortir cette foutu réponse. Il était trop fier ou quoi? Ou alors c’était Krystin qui se faisait des idées. Et en plus, voilà que le ton remontait entre eux. Ce n’était pas croyable, on aurait dit qu’ils étaient réglés comme une montre : quand ça sentait la fin de leur rencontre, ils s’engueulaient! Enfin là pour l’instant, la demoiselle essayait de se contrôler, elle ne voulait pas que ça se termine par un je te boude encore une fois. D’ailleurs elle voyait bien que le blondinet en avait marre de toutes ses questions. Mais elles étaient tout à fait légitimes tout de même! Il y avait de quoi se poser des questions. Ce n’était pas tombé du ciel comme ça. Mais bon, Aymeric n’en avait rien à faire et il ressortait ses mêmes réponses.

- Mais bien sûr Aymeric c’était pour te provoquer mais…

Non, il fallait qu’elle se taise, sinon il allait péter un câble. Et elle aussi d’ailleurs. Mais mince alors, ses réponses ne lui convenaient pas! Et elle ne savait pas pourquoi elle s’acharnait autant sur ça aussi. Pourquoi elle réagissait de cette manière là? Pourquoi elle avait été contente de le voir? Pourquoi elle restait encore là à essayer de lui faire sortir ce qu’elle voulait entendre? Que non, il n’avait pas fait la comédie mais pour quelque chose de bien précis. Peut-être qu’elle se faisait tout simplement des idées, peut-être qu’elle devenait folle qui sait? Cette situation la rendait complètement folle en fait. Elle ne savait plus quoi en penser, ni comment réagir, de peur qu’Aymeric le prenne mal ou elle ne savait plus quoi. Complètement perdue Krystin en fait. Et le voilà qu’il demandait si c’était bon maintenant. Ouais, il n’en avait carrément rien à faire. Elle soupira en baissant les yeux au sol puis répondit :

- Oui c’est bon tu es libre. Dépêche toi vite de partir avant que je ne t’ennuie encore.

Dit-elle d’un ton maussade. Elle ne pouvait donc plus discuter avec lui. Il s’en foutait, autant arrêter au lieu de gaspiller sa salive pour rien du tout. Elle releva les yeux vers lui, avec un maigre sourire, puis tourna les talons. Qu’est-ce qu’elle allait faire maintenant? Rentrer chez elle? A pied bien sûr, elle n’avait pas d’argent pour prendre le taxi, elle avait complètement oublié de quoi payer chez elle. C’était malin. Et puis, c’est bizarre, le vent se levait. Elle jeta un coup d’œil au ciel : de gros nuages noirs s’étaient infiltrés entre les gratte-ciels. Et une goutte tomba sur son nez. Et mince, il allait pleuvoir et elle devait rentrer à pied, si ce n’était pas merveilleux ça.

Elle rentrerait sous la pluie, tant pis. Tant qu’à faire, elle s’en foutait, elle prendrait une bonne douche en rentrant et puis c’est bon hop, au lit. Ou au pire, elle prendrait un taxi, mais bizarrement Krystin avait envie de marcher, de s’aérer, avec tout ce qui venait de se passer. Elle voulait penser à autre chose, parce que dans sa tête à cet instant précis, c’était carrément le fouillis. Mais elle devrait reporter cette préoccupation à plus tard car quelqu’un l’appela. Ce n’était pas Aymeric, car cette voix l’appelait lui et elle aussi. Les enfants? Krystin regarda devant elle les sourcils froncés. Elle l’aurait parié, c’était Pride. Elle qui voulait être tranquille cette soirée, ça n’allait pas le faire. Et en plus elle devrait retourner auprès d’Aymeric car lui aussi croyait qu’ils étaient un couple! Et merde. Ils s’étaient mis dans un truc pas possible. Faudrait peut-être un jour faire semblant de rompre devant tout le monde, pour qu’ils les laissent tranquilles. Et ça ne se révélera pas trop difficile car ils se criaient dessus à chaque fois qu’ils se voyaient.

La jeune femme hocha la tête en lui accordant un petit sourire quand Pride la complimenta. Krystin suivit ensuite la scène où ce dernier demandait où était passé l’autre Golman. Oh mais? Noooooon quoi. Elle devait donc faire le chemin avec eux? Bien sûr, sinon ce n’était pas crédible! Krystin soupira puis leva les yeux au ciel. Les gouttes commençaient vraiment à tomber, il était peut-être temps d’aller dans la voiture. Elle jeta un coup d’œil à Aymeric qui la regardait et elle fit mine de s’en foutre, reportant ses yeux vers Pride qui avait l’air complètement idiot en les regardant tous les deux, les yeux pleins d’espoirs. C’est alors que la pluie commença à tomber vivement. Krystin vit Aymeric partir en courant et le suivit de même. Pride était sensé les suivre également non? Arrivés jusqu’à la voiture, la jeune femme s’installa du côté passager, et sentit Pride qui s’installait derrière. Elle passa une main dans ses cheveux mouillés. Yeah, super le brushing. Maintenant ses cheveux allaient friser comme pas possible, truc qu’elle détestait. Elle s’entreprit donc de mettre sa ceinture quand Pride recommença à en placer une :

- J’espère que ça ne vous dérange pas, je ne sais pas si vous avez prévu quelque chose après.

Sérieusement, il ne pouvait pas se la fermer des fois? Sans prendre la peine de tourner la tête vers ce cher monsieur, Krystin lui répondit :

- Oh non, ne vous inquiétez. On n’avait strictement rien prévu.

Et comme Pride ne pouvait pas s’en empêcher :

- Oh Krystin je suis sûre qu’Aymeric vous a préparé une petite surprise quand vous rentrerez chez vous.

Dit-il en rigolant et en posant une main sur l’épaule du jeune blondinet. Krystin se mordit la lèvre pour s’empêcher d’éclater de rire. Aymeric, préparer une surprise? Quel genre de surprise? Elle avait peut-être une idée de ce qu’avait Pride derrière la tête. La seule chose à dire c’est qu’il ne manquait pas de culot. La demoiselle ne put s’empêcher de tourner les yeux vers Aymeric juste pour voir comment il allait réagir. Elle aussi était curieuse de savoir.

Evidement, ça serait trop rêvé pour que le Pride se la boucle. Le connaissant, il ne pouvait fermer son joli petit clapet. Et évidement, il fallait qu'Aymeric et Krystin jouent les hypocrites ? Dans quel monde vivons-nous ? Oui, la situation était complétement absurde.

Genre oui, ça allait les déranger là, de le ramener chez lui, ce Pride ?! Ce n'était pas un peu tard de dire ça et tout ? Quel con ! Allez, qu'il dégage sous la pluie, ça ferait bien plaisir ! Aymeric en avait profité pour démarrer la voiture, et veillait à sortir de son stationnement... Et voilà que l'autre gros pétard n'avait pas sa langue dans sa poche et posait sa main sur son épaule. Chose qu'Aymeric n'appréciait venant de la part de ce Pride... Oui, encore un geste un peu déplacé. Il ne portait pas spécialement Pride dans son coeur et ils n'étaient pas potes.

Vous avez été flic dans une autre vie ? Demanda Aymeric concentré sur sa route.

Il était parti pour sortir de l'avenue, sous cette forte pluie.

J'aurais pu ! J'avoue que quand j'étais petit, je rêvais d'être policier. Dans la cour de l'école, je ne voulais jouer qu'à ça et après...

Et blabla, ça y était, Pride changeait de sujet, vraiment du coq à l'âne. N'importe quoi ! Il était sûr qu'Aymeric pourrait réserver une surprise à Krystin, genre... Un diner au chandelle ? Ou il avait l'esprit mal tourné ? Mais il avait bien l'esprit de tout gâcher si c'était réellement le cas, si Aymeric avait réellement préparé une surprise. Mais non, en tout cas, il n'y avait rien pour arrêter la pipelette. Surtout en conduisant, c'était une chose désagréable, non ? Ce n'était pas mieux d'avoir un peu de calme, de tranquillité avec la radio en route ? Heureusement que Pride ne vit pas encore au bout de la ville. Aymeric n'aurait sans doute pas tenu le coup et l'aurait abandonné au milieu du trottoir. Voilà qu'il continue dans sa lancer :

Dîtes-moi, les enfants, rafraichissez-moi la mémoire, comment êtes-vous rencontrés ? C'est toujours ça qui m'intrigue chez un couple... Comment ils ont pu tombé amoureux ? C'est toujours d'un romantisme en général. J'adore ça !

Genre c'est un fleur bleu, ce type... En plus, Aymeric lui avait justement dit à la soirée bourgeoise... Comme quoi Krystin avait pu passé à son disquaire pour un album.. Alors qu'elle ne devait même pas savoir où il travaille. Heureusement, Aymeric ralentit la voiture et se mettait sur le côté.

Vous voici devant votre demeure, Monsieur Pride... Fit Aymeric, regardant le visage de « l'autre » là derrière, dans le rétroviseur.

Oh, on est déjà arrivé ? Comme c'est passé trop vite ! Je n'y crois pas... Franchement...

Et blabla, et, c'était reparti... On n'arrêtait jamais un moulin à paroles. Ouf, et heureusement, cinq minutes après, il sortit ENFIN de la voiture. Quel soulagement... Franchement!!! Sans un mot, Aymeric reprit la circulation sur la route... Il paraissait bien sûr pensif... Mais soudainement, rien que de penser à ce Pride là, il se mit à sourire avant de rire tout seul. C'était tellement con... Oui, très con!

Pendant tout le trajet ce cher monsieur Pride ne put pas s’empêcher de parler. Il ne ferma pas sa bouche juste une seconde, à part peut-être pour renouveler sa salive qui devait partir souvent en fumée. Punaise, c’était incroyable la tchatche qu’il avait. Krystin avait décroché dès qu’il avait ouvert la bouche. C’était comme un bruit de fond, qui aidait alors que les deux jeunes personnes ne se parlaient pas. Ca aidait dans leur silence en fait. Mais Pride partait vraiment dans ces délires. La demoiselle se demandait si ce dernier avait une femme et s’il en avait une, elle la plaignait vraiment. Qui pouvait vivre avec quelqu’un comme ça? C’est sûr qu’on ne manquait pas de s’ennuyer ou d’avoir peur de ne pas savoir quoi dire avec ce type dans les parages.

Enfin, Aymeric annonça au parleur qu’ils étaient arrivés à destination. Oui qu’il s’en aille et plus vite que ça! En plus il s’emmerdait pas le petit Pride, il vivait dans un beau quartier de New-York. Aller, ouste, du balais! Ah enfin un peu de silence. On n’entendait à présent que le bruit de la pluie qui tombait dehors. Krystin restait silencieuse, regardant par la fenêtre. Maintenant, le jeune homme l’amènerait chez elle et tout se terminerait comme ça. Sauf que quelque chose qu’elle n’avait pas prévu : Aymeric se mit à rire. C’était même peut-être la première fois qu’elle le voyait rire. Elle tourna sa tête vers lui, les sourcils froncés puis ne put s’empêcher de sourire.

- Dans quel merdier on s’est foutu…

Dit-elle en rigolant à moitié. Elle passa une main dans ses cheveux, qui étaient à présent un peu plus sec que tout à l’heure puis alluma la radio :

- Ah enfin un bruit de fond pas trop chiant.

Comparé à Pride, tout devait être paradisiaque comme bruit de fond! Bon Dieu, elle se demandait vraiment comment il avait réussi dans la vie et comment il n’avait pas fait pour énerver les gens autour de lui.

- Il faudra peut-être qu’on pense à casser un jour.

Dit-elle en rigolant une nouvelle fois. Casser alors qu’ils n’étaient même pas ensemble, le comble du comble. Quelle histoire je vous jure. C’était quand même assez drôle quand on y repensait, au moins Krystin pratiquait la comédie. Ce n’était pas ça de perdu déjà. Krystin regarda au dehors, les immeubles se faisaient familiers. Ils arrivaient presque à destination. Enfin, chez elle quoi. Et d’un coup, la demoiselle eut une idée. Certes, étrange, mais bon… Qui ne tente rien n’a rien.

- Hum… Tu veux monter boire un verre?

Dit-elle en tournant ses grands yeux verts sur ceux du blondinet. Oh aller, ne faites pas les étonner. Elle était gentille quand elle le voulait la petite Krystin. Juste quand elle le voulait. Et là, elle en avait envie. Ne cherchez surtout pas à savoir pourquoi, c’était comme ça.

C'était tellement nerveux. Sûrement les faits secondaires de cette soirée, non ? Que ça lui fasse rire autant... Ce n'était que des conneries, ce n'était que pour préserver l'image de Krystin... Ou n'était-ce plutôt qu'un jeu encore. Mais ouais, c'était complétement con tout ça.. Et au fond, à voir si Aymeric s'était rendu compte qu'il avait ri. Ri devant Krystin... Lui qui avait tout juste pour habitude de ne pas rire, de dégager une certaine froideur et rien d'autre... Et pourtant il restait humain. Il fallait juste gratter le vernis de la surface.

Comme si ça devenait une habitude, comme si elle faisait comme chez elle, elle alluma la radio. La chanson qui défilait n'était autre que « Wonderwall » d'Oasis. Ouais, ils étaient dans un merdier et il fallait vraiment casser. C'était une excellente idée.

Ouais !

Ouais avant de s'enfoncer dans un tourbillon à n'en plus finir. Ca ne ferait qu'empirer la situation, et ils n'allaient pas non plus se suivre jusqu'à la fin.

On finira par ne plus se quitter à force...

La bonne blague. Ouais, à force de se voir... Mais bon, à chaque fois qu'ils se voyaient, ils étaient obligés de passer par une engueulade et il ne fallait pas non plus que ça devienne une habitude et qu'ils commencent à apprécier ça.

Et dire tout ça à cause d'une simple ... fille.

Une fille - dont il ne savait même plus son nom d'ailleurs... - qu'il lui collait au basque à la soirée VIP. Du vraiment n'importe quoi, rien que d'y penser, sérieusement.
Arrivant à un carrefour, Aymeric regardait de gauche à droite avant de finir par tourner, et finir par arriver à destination, devant l'immeuble de la charmante demoiselle. D'ailleurs, il y avait tout juste une bonne place devant chez elle, il s'y gara en créneau. C'était bon. Une question qui surgit et qui l'étonna à travers la chanson en arrière fond... Aymeric jeta alors un coup d'oeil vers Krystin, comme si c'était pour voir si elle était réellement sérieuse. A croire que l'arrivée de Pride de tout à l'heure les avait presque réconcilié, ou pensaient-ils tous les deux qu'il ne fallait pas se prendre la tête pour des broutilles. Et était-ce un autre « au revoir » qu'elle proposait. Un verre de l'amitié ? Pourquoi Aymeric se mettait-il à penser face à ça ?

Ok... accepta-t-il après un léger silence.

Il avait demi-sourire sur les lèvres, allez savoir pourquoi... Mais il n'y avait qu'à voir les jolis bouclettes qui se formaient sur les cheveux de la demoiselle à cause de la pluie, son petit regard qu'elle lui avait jeté...

Non, ce n'était pas pour ça. Oh non ! Après, si c'était une occasion pour parler un peu de savoir comment ils allaient pouvoir se débrouiller pour la suite. Ce n'était pas compliqué, hein ? Mais passons... Aymeric éteignit le moteur et on ne pouvait qu'entendre la pluie s'abattre à l'extérieur.

C’est vrai que s’il devait revenir tout au début de l’histoire, tout cela était à cause d’une petite brunette qui voulait draguer Aymeric. Et Krystin, ne pouvant pas résister à jouer la comédie et à sauver le pauvre blondinet de l’emprise de l’autre jeune femme, alla à sa rescousse. C’est poétique pas vrai? Enfin poétique jusqu’à maintenant où ils étaient coincés dans leurs rôles respectifs du petit ami et de petite amie. Génial ouais. Mais c’était drôle quelques fois, qu’est-ce qu’on pouvait faire croire à d’autres personnes. Enfin bref, tout cela pour dire que maintenant Aymeric avait garé la voiture devant l’immeuble où habitait Krystin. Et que cette dernière sur un coup de tête, l’avait invité à monter. Ouais sur un coup de tête car en vérité elle n’avait pas vraiment réfléchis. C’était sortit tout seul de sa bouche. Elle vit bien que le blondinet était perplexe face à cette invitation, et la jeune femme ne pouvait que le comprendre. Elle fut tout de même soulagée qu’il réponde positivement. Sinon, elle serait restée bien idiote ou vu le caractère de la belle, elle serait partie au quart de tour. Mais là, il avait accepté, alors let’s go.

Sous la pluie torrentielle, la demoiselle ouvrit sa portière et la ferma rapidement pour qu’elle court se mettre à l’abri devant la porte de l’immeuble, suivit par Aymeric. Elle fouilla dans son sac, en sortit les clés, puis ouvrit enfin cette maudite porte. Elle fit signe au blondinet de la suivre, puis emprunta les escaliers au lieu de l’ascenseur. Oui deux étages, on n’allait pas mourir non plus. Arrivée devant la porte de son appartement, elle tourna une nouvelle fois la clé dans la serrure et comme par magie la porte s’ouvrit laissant apparaitre là où vivait la demoiselle. Ca va, ce n’était pas trop le bordel. Bien sûr ce n’était pas un appartement luxueux, loin de là. Mais il y avait un certain confort. Les femmes ont du goût pour la décoration pas vrai? Elle laissa Aymeric entrer, puis ferma la porte derrière lui. Elle enleva sa veste et son sac qu’elle mit sur une table de l’entrée puis invita le blondinet à faire de même :

- Je t’en prie, fais comme chez toi.

La phrase typique et banale. En passant vers le salon, elle se regarda vite fait dans un miroir qui ornait le petit couloir : oui bon, elle n’était pas très en beauté là, ses cheveux frisaient et elle était toute trempée. Elle alla ensuite à la cuisine, montrant du doigt le canapé à Aymeric l’invitant à s’asseoir. Une fois dans la cuisine, elle attrapa deux bières dans le frigo, les ouvrit, puis retourna vers le salon, en passant une au jeune homme. Elle s’assit ensuite à côté de lui et s’entreprit de boire une gorgée. Restant un instant en silence, elle posa les yeux sur lui puis demanda, curieuse :

- D’où est-ce que vient ton accent?

Oui, elle ne lui avait jamais demandé, et pourtant elle n’entendait presque que ça. Ce qui l’étonnait c’est que son père ne l’avait pas cet accent, il devait y avoir quelque chose c’était obligé. C’était presque comme un accent de l’est, pas français, encore moins espagnol. Bon, elle verrait bien.

Sortant de la voiture, Aymeric ne pouvait que suivre Krystin. Elle ne vivait pas dans un quartier de luxe mais ça, il s'en foutait. Ce n'était pas un détail qui le marquait réellement. Il n'y avait qu'à voir son propre appartement. Il pouvait avoir les moyens d'agrandir mais il préférait les choses simples, et n'aimant pas vraiment se faire remarquer, c'était une raison de plus.
Silencieusement, après avoir monté les deux étages, il découvrit alors le cocon de Krystin. Oui, il fallait savoir que depuis ils se connaissaient, là, il entrait dans son intimité, dans sa vie privée. Il ne put s'empêcher de ralentir le pas, brusquement. Ce n'était pas chez lui, tout lui était inconnu. Ce n'était pas bordélique, ni trop nickel... Va-t-on dire que c'était plutôt vivant, confortable... Un endroit qui faisait bon vivre, quoi ! Bon, selon Krystin, il pouvait faire comme chez lui. Cool, hein ? Il avait commencé doucement à enlever sa veste - le laissant en simple chemise - et il le posa sur le canapé, tout en s'asseyant.

Il attendit Krystin qui revint s'asseoir à côté de lui, lui passant une bière, qu'il prit volontiers. Il commença à boire une gorgée, ne sachant que dire réellement, ce qui ne changeait pas à d'habitude, vraiment... Mais ça devenait presque gênant, non ? Comme c'était pas son truc... Mais heureusement, elle lui posa une question. Il détourna son regard sur elle, avec cette cheveux un peu en bataille. Oui, c'était un détail qui lui plaisait. Certes, comme il l'avait vu, elle s'était regardé dans le miroir et ça ne semblait pas lui avoir plu, lui, au contraire, il lui trouvait un charme. Enfin, fallait-il qu'il pense à lui répondre, alors autant chasser toutes ses pensées.

Je suis Russe... répondit-il.

Bizarre depuis le temps, Krystin ne lui avait jamais posé la question immédiatement. D'habitude, tout le monde était poussé par la curiosité, mais son interlocutrice ne lui avait jamais posé de questions gênantes. Bon là, par rapport à son accent, il n'avait rien à cacher, qu'est-ce qu'il pouvait bien lui cacher ? Hein ? Ca faisait dix-huit ans qu'il était ici en Amérique, bien sûr depuis le temps, il aurait très bien pu le perdre cet accent et ça aurait été bien sûr, scientifiquement correct.

Enfin de moitié, mon père est bien américain... anticipa-t-il à une des prochaines questions.

Ouais, ce John Hewson qu'il ne portait pas réellement dans son coeur, ça pouvait se voir, c'était limite il disait ça en regardant le vide devant lui. Il but une autre gorgée de la bière avant de poser la canette sur la table basse.

Mais on n'est pas là pour parler de lui!

Et ouais, quand même! Il ne fallait pas déconner. Il émit un demi-sourire à ses paroles avant de jeter un coup d'oeil vers elle. Son regard se plongea dans le sien. Ca se passait comme ça ? Ils faisaient connaissances maintenant dans un lieu calme, autour d'un verre, sans personnes qui viennent les enquiquiner ?